Je n’aime pas le classique mais avec Alex Vizorek j’aime bien !

Une recette gagnante 

Prenez un humoriste belge incontournable à la verve caustique et aux jeux de mots subtils, qui fait de l’art – et de la musique classique en l’occurrence – son terrain de jeu privilégié. Ajoutez un violoniste prodige inspiré et une rockstar du piano. Etoffez avec un quatuor émérite. Saupoudrez de Vivaldi, de Mozart, de Beethoven. Créez la surprise en distillant ici et là quelques anecdotes truculentes sur des compositeurs plus ou moins connus du grand public. Choisissez des œuvres emblématiques et présentez le tout dans un écrin d’exception devant un auditoire aux aguets. 

Vous obtiendrez un programme riche, ludique et éclectique, brillamment orchestré par un maître de cérémonie dont l’enthousiasme et les facéties vous réjouiront. Passionné de culture, Alex Vizorek met ici son humour au service de la musique classique, qu’il aime faire découvrir ou simplement partager avec un public parfois néophyte. Ainsi, il pose avec brio un texte ciselé et percutant sur un florilège musical, dans une atmosphère à la fois festive et chaleureuse.

Des cymbales aux cordes

Reprenant le flambeau de Gaspard Proust, qui incarnait ce rôle il y a quelques années, Vizorek a donc délaissé ses célèbres cymbales pour les cordes et partage avec nous une jolie sélection de « tubes » classiques intemporels. Accompagné de six musiciens de haut vol, il nous fait voyager à travers les époques et les frontières. Tout au long du spectacle, nous survolerons l’Italie de Vivaldi, la France de Saint-Saëns et Bizet, l’Allemagne de Brahms et l’Autriche de Mozart, avant de traverser l’Atlantique pour rejoindre l’Argentine de Piazzola puis l’Amérique de Gershwin. 

Dans son costume de velours sombre, Luka Faulisi, 23 ans, nous offre un jeu d’une virtuosité éclatante, où les notes jaillissent avec élégance et fluidité. Sa palette de couleurs, riche de mille nuances, s’exprime au gré d’une gestuelle franche et audacieuse. A une vitesse folle, son archet dessine dans les airs des volutes d’arabesques incandescentes. Mais quelle interprétation remarquable du troisième mouvement de « L’Été » de Vivaldi ! Sublime. Complice et éloquent, le Quatuor Eden met les sons en exergue, souligne les contrastes, enrichit les textures, transportant le public vers un ailleurs merveilleux.

Des pulsations rythmiques qui nous transcendent

Pantalon noir en cuir, veste patchwork et mèches rebelles, Simon Ghraichy, pianiste franco-libano-mexicain né en 1985, incarne un style flamboyant à l’image de son jeu, fougueux et habité. Dès les premières mesures de la « 7è Symphonie en la majeur » de Beethoven, une tension dramatique envahit l’espace. Le piano lance les premières notes, presque incantatoires. Les cordes suivent : violons, alto, violoncelle et contrebasse font vibrer les graves avec une profondeur viscérale. L’énergie monte progressivement, se fait de plus en plus tangible. Les pulsations rythmiques nous transcendent corps et âme. 

Si « la musique commence là où s’arrête le pouvoir des mots », comme le disait Wagner, ce spectacle réussit à faire dialoguer les deux avec talent, humour et légèreté. Je n’aime pas le classique mais avec Alex Vizorek j’aime bien ! ouvre les portes d’un univers souvent perçu comme élitiste en le rendant savoureusement accessible. Un voyage musical plein d’esprit qui ravira petits et grands.