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Un programme post-romantique signé Klaus Mäkelä à la Philharmonie de Paris

par Julien Coquet
18.05.2024

Soirée jeune hier soir, jeudi 16 mai 2024, réservée aux moins de 28 ans, pour un double programme post-romantique mariant La Nuit transfigurée de Schönberg et la Symphonie n°4 de Mahler.

Des pas bruissent dans la forêt tandis que des premières plaintes montent. Ainsi s’ouvre La Nuit Transfigurée de Schönberg, donnée ici dans sa version pour orchestre à cordes révisée en 1943 (la version initiale pour sextuor à cordes date de 1899). Seules les cordes de l’Orchestre de Paris sont donc convoquées pour cette première partie, infiniment émouvante. Le chef Klaus Mäkelä parvient à insuffler un dynamisme, presque un suspens parfois, ou en tout cas une tension qui parcourt toute l’œuvre. La partition se réfère à un poème de Richard Dehmel dans lequel une femme annonce à un homme qu’elle porte un enfant, mais qu’il n’est pas le père. Les cordes parviennent à retranscrire les différents plans de l’œuvre, lorgnant du côté du romantisme de Brahms et d’autres œuvres de Schoenberg, notamment les Gurre-Lieder. On sort émerveillé par les quelques interventions du violon solo invité, Petteri Iivonen, et par cette fin, décidément transfigurée et apaisée, réglant dans la compréhension et l’acceptation le problème exposé par la femme à l’homme.

 

La Symphonie n°4 de Mahler : une œuvre lumineuse

 

Bien plus lumineuse est l’œuvre qui succède à celle de Schönberg. La Symphonie n°4 de Mahler, plus courte que les autres symphonies du maître autrichien, se révèle aussi moins sombre et davantage portée vers la lumière que ses consœurs. Klaus Mäkelä, chef principal de l’Orchestre philharmonie d’Oslo en plus de son poste de directeur musical de l’Orchestre de Paris, a d’ailleurs ouvert sa quatrième saison à Oslo avec cette Quatrième de Mahler.

 

Le premier mouvement de l’œuvre, Délibéré. Sans presser, parvient à nous immerger directement dans l’univers mahlérien, où l’esprit joyeux côtoie finalement des passages plus sombres. Comme l’explique le programme : « quelques grains de sable se glissent néanmoins dans ces couleurs solaires ». Grains de sable qui amusent plus qu’ils ne dérangent dans le second mouvement, au tempo modéré, où le violon solo joue sur un instrument accordé un ton plus haut. Ces saillies du violon rappellent quelques danses folkloriques. Les deux derniers mouvements déçoivent pour autant dans leur interprétation. L’avant-dernier, l’adagio, paraît empesé, manquant de tension dramatique, voire de tristesse, avant que, dans les dernières mesures, le chef réveille ses troupes d’un formidable crescendo. Sans transition suit le quatrième mouvement lors duquel apparaît une soprano, ici Christiane Karg, dont la voix manque d’ampleur et de projection. Peut-être la faute à sa position au sein de l’orchestre, reléguée proche des contrebasses et non en première ligne comme le veut l’usage. Après une belle soirée matinée de quelques réserves, il est donc dommage de passer à côté de ce moment vocal conduisant à la sérénité.

La Nuit transfigurée d’Arnold SCHÖNBERG et Symphonie n°4 de Gustav MAHLER, Orchestre de Paris, Klaus Mäkelä (direction), Christiane Karg (soprano), Petteri Iivonen (violon solo invité), Grande Salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris, jeudi 16 mai 2024

Credit : © Marco Borggreve