Le court essai de Vincent Jacques, publié chez Quidam éditeur, revient sur les liens entre Jorge Luis Borges et le Septième art.
Si Jorge Luis Borges, écrivain argentin, est connu pour s’être intéressé à toutes les formes de littérature, il faut aussi noter qu’il n’était pas insensible au cinéma. En Argentine, en 1930, on compte environ mille salles de cinéma, ce qui permet à Borges de se rendre dans les salles obscures deux à trois fois par semaine. Borges et le cinéma revient sur la période où Borges rédigeait des notes et des critiques sur les films qu’il voyait, puis sur le pied qu’il mit dans le cinéma, particulièrement via deux films notables.
Dès les années 1930, Borges écrit régulièrement dans des revues sur les films qu’il a le plaisir de voir. De là se dégage un certain goût pour le cinéma, qu’il rapproche souvent du théâtre. Pour lui, peu importe la technique ou la photographie, « il apprécie plutôt un cinéma classique dans lequel les moyens filmiques ne prennent pas le devant et sont subordonnés à la mise en scène de la trame narrative ». Ce qui plaît avant tout à l’auteur de Fictions, ce sont les bonnes histoires, le dépaysement et le charme de certaines divas. A la lecture du livre, on peut alors dresser une petite cartographie de ce que Borges aime (les films de Josef von Sternberg, Sérénade à trois (Lubitsch, 1933)) et n’aime pas (La passion de Jeanne d’Arc (Dreyer, 1928), le symbolisme du cinéma allemand, Les Lumières de la ville (Chaplin, 1930)).
Vincent Jacques creuse malheureusement peu l’influence qu’aurait pu avoir les films visionnés par Borges sur son écriture. Pour autant, le maître de conférences en philosophie à l’ENSA Versailles revient sur deux nouvelles du maître argentin adaptées au cinéma : « L’homme au coin du mur rose » par René Mugica en 1962 (plutôt satisfait de l’adaptation) et « Emma Zunz » (Jours de colère, Leopoldo Torre Nilsson, 1954), toujours rejeté et vivement critiqué.
Plus longuement, Vincent Jacques explore deux films tournés d’après un scénario de Borges et de son compère Adolfo Bioy Casares : Invasión (« Invasion est la légende d’une ville, imaginaire ou réelle, assiégée par de puissants ennemis et défendue par quelques hommes qui, peut-être, ne sont pas des héros. Ils lutteront jusqu’à la fin, sans se doute que leur bataille et infinie. » explique Borges) et Les Autres. Tous deux réalisés par Hugo Santiago, qui fut l’assistant de Robert Bresson, les films sont présentés à Cannes en 1969 et 1974. La description et l’analyse de ces films faites par Vincent Jacques donnent envie de dénicher ces films difficilement trouvables.
Borges et le cinéma, Vincent JACQUES, Quidam éditeur, 96 pages, 12 €
Visuel : © Couverture du livre