L’égérie des années 2000 de Woody Allen passe derrière la caméra et fait sa première montée des marches comme réalisatrice à l’âge de 40 ans. Et c’est un triple sujet qu’elle propose au public d’Un Certain Regard : le quotidien d’une femme de 94 ans en deuil, l’usurpation d’identité et une plongée dans le judaïsme new-yorkais.
Tout commence en Floride, mais l’une des deux femmes a l’accent polonais et l’autre New-Yorkais. Elle sont veuves, meilleures amies depuis 40 ans et vivent ensemble depuis 12 ans. Bess et Eleanore sont un vrai couple : l’une douce et timide et l’autre une vraie tarie Danielle. Mais Bess meurt. La fille d’Eleanore décide alors de faire venir vivre sa mère quelques temps chez elle à New-York et l’inscrit à la chorale de la synagogue pour l’occuper. Sauf que la grand-mère se trompe de couloir et se retrouve dans un groupe de parole d’anciens déportés. Coincée, elle se met à raconter la vie de Bess qu’elle connaît aussi bien que la sienne… Et rencontre à cette occasion une nouvelle amie de … 22 ans.
Cadrages marqués, détails sophistiqués, dialogues ciselés, la mise en scène de Eleanore the Great est très travaillée et son sujet est à la fois décalé (un portrait de vieille dame) nourri de détails très justes (les baskets, par exemple) et très « feelgood ». Tout le monde est légèrement freak et personne n’est vraiment méchant dans ce film où on en apprend beaucoup sur les us et coutumes des juifs modernistes de New-York.
Ainsi, portée par des acteurs beaux et touchants, déroulant son intrigue à peu près comme on l’attendait et prônant assez sagement le triomphe de la morale et de l’empathie, Eleanore the Great est un joli film, peu prétentieux et plein de tendresse. Il est néanmoins un peu sage sur sa forme -surtout- et sur son message pour pleinement emporter son public.
Eleanore the Great, de Scarlett Johansson, avec June Squibb, Chiwete Ejiofor, Erin Kellyman, Jessica Hecht, Rita Zohar, USA, 2024, 98 minutes, En avant-première au 78e Festival de Cannes
Visuel : ©Sony Pictures Classics