À Avignon, il y a le festival, surnommé « le In », il y a le Off et il y a des entre-deux. Sélection Suisse en fait partie, avec une programmation d’avant-garde assumée. Jusqu’au 18 juillet, Marion Duval nous présente son indispensable amie Cécile. Un choc sensible et esthétique.
La metteuse en scène nous annonce le programme, l’air un peu « j’menfoutiste ». Elle nous dit : « On rejoue des morceaux de la vie de Cécile. » Cécile Laporte est l’une de ses amies. Et Marion Duval nous affirme que c’est quelqu’un à connaître. La comédienne apparaît toute de jean vêtue. Elle nous parle avec une distance très rigolote et au-dessus d’elle se place son visage immense modelé en 3D. Effectivement, elle raconte sa vie. Elle annonce la couleur, le pire a rendez-vous avec nous. Elle commence le spectacle par un récit de vie qui donne le ton : « Voyage handicapé ». Cécile Laporte joue rapidement avec nos émotions. Elle commence avec un humour esprit Les Grosses Têtes, très éloigné des publics de Sélection Suisse. Et, puis, progressivement, le double jeu se met en place. Elle passe son temps à faire et défaire une émotion pour qu’elle nous revienne en pleine face encore plus fort. Son voyage est en fait une leçon d’humanité, où seule et avec très peu de moyens, elle a dû s’occuper d’un groupe de gens avec des handicaps différents. Elle dit plus tard qu’il « faut aller vers les gens que l’on ne voit », et toute la pièce nous invite à les accueillir, par-delà nos stéréotypes.
On rit beaucoup, on rit gras, on rit potache, et plus la proposition avance, plus on rit pour ne pas parler. Performeuse démente, elle est excessivement à l’écoute des moindres soubresauts de l’audience. Elle démonte le quatrième mur, elle l’escalade même. Ce qui est extrêmement fou dans ce spectacle, au-delà des époustouflants talents de conteuse et de raconteuse, c’est que la beauté surgit à chaque fois au moment le moins attendu. Il ne faut rien dire de ces images, sinon cela gâcherait toutes les révélations. Et elles sont si nombreuses… Effectivement, Marion Duval a hautement raison. Il faut rencontrer Cécile. À la fin, vous ne saurez plus ce que vous avez traversé avec une telle intensité, tant ses niveaux de jeu oscillent entre le clown, le stand-up, la performance totale et le grand théâtre.
Un énorme choc à voir absolument.
Visuel© Mathilda Olmi