Saison 2024-25 du MET : sous le signe de l’opéra contemporain et des nouvelles stars
par Helene Adam22.02.2024
La direction du Metropolitan Opera de New York vient d’annoncer sa nouvelle saison 2024-25 et confirme son choix de privilégier les nouvelles productions d’opéras contemporains qui seront au nombre de quatre dans des répertoires assez variés. Le MET accueillera également de nombreuses stars montantes de l’art lyrique de Lise Davidsen à Pene Pati.
Place à l’opéra contemporain
La nouvelle saison du Metropolitan Opera de New York s’ouvrira en septembre 2024 avec une nouvelle production de l’opéra créé en octobre 2023 au Kennedy Center à Washington, Grounded. L’acte 1 a été revu par la compositrice pour les représentations du MET. L’œuvre est une adaptation de la pièce éponyme de Georges Brant présentée en 2013 et qui raconte le combat d’une femme pilote d’avion face à la généralisation des drones. C’est sur la base de cette pièce qui mettait en scène l’actrice Anne Hathaway dans une sorte de one-woman-show, que le MET a commandé à la compositrice Jeanine Tesori, cet opéra. Avec Missy Mazzoli pour le futur « Lincoln in the bardo », Jeanine Tesori est la deuxième femme à bénéficier d’une commande du MET. Comme au Kennedy Center il y a quelques mois, c’est la mezzo-soprano Emily d’Angelo qui incarnera le rôle de la pilote d’Air Force tandis que le directeur musical du MET, Yannick Nezet-Seguin en sera le chef d’orchestre.
Le directeur du MET, Peter Gelb, mise clairement sur les œuvres qui abordent des thèmes actuels et modernes, puisque, outre ce Grounded, le MET proposera lors de la nouvelle saison, trois autres opéras contemporains dont les sujets, comme les compositeurs, éveillent incontestablement l’intérêt.
Il s’agit tout d’abord, dès le mois d’octobre, de l’émouvant Ainadamar de Osvaldo Golijov. Ainadamar, la « fontaine aux larmes » est le lieu près de Grenade où le poète Federico Garcia Lorca, révolutionnaire et martyr, fut assassiné par les franquistes dans l’Espagne de 1936. L’opéra, en langue espagnole, de Osvaldo Golijov, raconte une histoire de legs, de transmission, et se passe en 1969 quand avant de mourir, l’actrice Margarita Xirgu, raconte sa rencontre avec Lorca et le sens de leur ferveur révolutionnaire d’alors. Créé d’abord en 2003 à Tanglewood, l’opéra a été remanié par le compositeur pour une nouvelle version créée en 2005 à l’Opéra de Santa Fe. Son arrivée pour la première au MET représente la consécration d’une œuvre originale et engagée. La mise en scène sera assurée par Deborah Colker et la distribution comprendra Daniela Mack, Angel Blue, Gabriella Reyes, Elena Villalón, et Alfredo Tejada.
Le Moby-Dick de Jake Heggie sera également présenté pour la première fois au MET dans une mise en scène de Leonard Foglia. Jake Heggie a déjà vu son célèbre Dead Man Walking (2000), ouvrir la saison précédente du MET. Moby Dick, qui a été créé à l’Opéra de Dallas en 2010, présente une très belle distribution, puisqu’on y retrouvera en mars 2025, Janai Brugger, Brandon Jovanovich, Stephen Costello, Peter Mattei, William Burden, Malcolm Mackenzie, et Ryan Speedo Green.
Le très attendu Antony and Cleopatra de John Adams, créé quant à lui en septembre 2022 au San Francisco Opera et repris cette saison au Liceu de Barcelone, bénéficiera d’une nouvelle mise en scène de Elkhanah Pulitzer pour son entrée au MET en mai 2025. Et c’est John Adams lui-même qui dirigera son œuvre avec les interprètes Gerald Finley, Elizabeth DeSHong, Taylor Raven, Brenton Ryan, Julia Bullock, Paul Appleby, et Alfred Walker.
On ne peut que saluer l’audace du MET qui, manifestement, rencontre un succès public avec ses créations d’opéras récents ou peu joués depuis leur création. Si l’on en croit les bilans des dernières saisons, les salles sont mieux remplies avec ce type d’œuvres contemporaines qu’avec le répertoire classique.
Aida et Salomé dans de nouvelles mises en scène
Deux autres nouvelles productions complètent la saison. Tout d’abord, en janvier, nous aurons Aida de Giuseppe Verdi, qui sera mise en scène par Michael Mayer, une « première » dont la date avait été repoussée du fait des annulations COVID. Dirigée par Yannick Nezet Seguin cette « nouvelle » Aida sera donnée une première fois pour le Nouvel An et fera l’objet de deux distributions successives : d’abord Angel Blue qui fera ses débuts dans le rôle-titre aux côtés de Judit Kutasi, Piotr Beczała, Quinn Kelsey, ensuite ce seront Christina Nilsson, pour ses débuts au MET avec Elīna Garanča, Brian Jagde et Amartuvshin Enkhbat. La deuxième distribution est tout particulièrement intéressante, à suivre !
Ensuite, en avril et mai 2025, nous aurons une nouvelle production de Claus Guth pour Salomé de Richard Strauss, qui, sous la direction de Yannick Nezet-Seguin, offrira le rôle-titre à Elza van den Heever (qui était également Salomé l’an dernier à Paris Bastille).
Des reprises avec de jeunes et nouvelles stars
Les reprises seront au nombre de 12 : pour Verdi, Rigoletto et Il Trovatore; de Puccini, Tosca et La Bohème; Les Contes d’Hoffmann d’Offenbach; Die Frau ohne Schatten de Richard Strauss; Fidelio de Beethoven ; Il Barbiere di Siviglia de Rossini; La Dame de Pique de Tchaikovsky ; de Mozart, Le Nozze di Figaro, Die Zauberflöte, et the « Magic Flute » en langue anglaise (présentée annuellement au MET). Rien de très original mais beaucoup de distributions intéressantes.
Les contes d’Hofmann (septembre) réuniront une jolie distribution avec Benjamin Bernheim dans le rôle-titre, et les débuts au MET de l’excellente mezzo-soprano Vasilisa Berzhanskaya en Muse/ Nicklausse, Pretty Yende en Antonia, Erin Morley en Olympia, Clémentine Margaine en Giuletta et Christian Van Horn en « Vilains ».
Tosca commencera en septembre avec Aleksandra Kurzak et SeokJong Baek et reprendra en novembre avec une retransmission cinéma en live HD, avec la prise de rôle de Lise Davidsen, l’un des événements de la saison, aux côtés du Cavaradossi du jeune ténor qui monte, Freddie De Tommaso et le Scarpia de Quinn Kelsey, qu’on entendra beaucoup au MET cette saison. Enfin au printemps 2025, une troisième reprise réunira Sondra Radvanovsky, Brian Jagde et Bryn Terfel qui fera son retour au MET après dix ans d’absence.
Deux séries également pour la reprise de Rigoletto, avec tout d’abord à nouveau Quinn Kelsey, avec l’excellente Gilda (la meilleure actuellement ?) de Nadine Sierra, et le Duc de Mantoue de Stephen Costello, puis dans un deuxième temps, Luca Salsi, Erin Morley et les débuts au MET d’un ténor très attendu également sur la grande scène de New York, Pene Pati.
On sera davantage dubitatif sur le Manrico de Michael Fabiano, dans Il Trovatore, qui sera accompagné par Rachel Willis-Sorensen et Angela Meade en alternance en Leonora.
Ensuite viendront les reprises de La Bohème (mise en scène par Zeffirelli), avec en alternance Kristina Mkhitaryan, et la très intéressante Corinne Winters en Mimi, et Matthew Polenzani, Joseph Calleja, et Dmytro Popov en Rodolfo.
Quelques pépites
En novembre, la reprise de Die Frau Ohne Schatten, attirera certainement les nombreux aficionados de cet opéra dantesque de Strauss, d’autant plus qu’il sera dirigé par Yannick Nézet-Séguin et offrira une distribution intéressante : Elza van den Heever en impératrice, Lise Lindstrom en teinturière, et Nina Stemme en nourrice, Michael Volle en Barak notamment.
En mars, le Fidelio fera l’objet d’une retransmission cinéma live HD, avec une distribution intéressante là aussi : Lise Davidsen reprendra son rôle de Leonore, brillamment créé à Londres juste avant les débuts de la pandémie, David Butt Philip sera Florestan, Tomasz Konieczny Don Pizarro, et nous retrouverons la basse René Pape en Rocco. Notons aussi la présence intéressante de la soprano Ying Fang et du ténor Magnus Dietrich qui feront leurs débuts au MET en Marzelline et Jaquino. Un autre événement de la saison.
Des distributions intéressantes sont également à noter pour les habituelles reprises de la Flûte enchantée, avec Ben Bliss et Golda Schultz, du Barbier de Séville avec l’excellente Rosina de Aigul Akhmetshina ( vue également à Paris Bastille), et des Noces de Figaro avec Olga Kulchynska, Rosa Feola, Joshua Hopkins, mais aussi Marianne Crebassa et Emily D’Angelo qui alterneront en Cherubino.
En mai, l’événement sera la prise de rôle en Lisa de Sonya Yoncheva dans La dame de Pique aux côtés du Hermann de Brian Jagde, nouveau rôle également pour le ténor.
Et toujours les retransmissions au cinéma en direct
Et comme de tradition, le MET assurera huit séances de retransmission cinéma en live HD dans le monde entier :
Les Contes d’Hoffmann, le 5 octobre, Grounded le 19 octobre, Tosca le 23 novembre, Aida le 25 janvier 2025, Fidelio, le 15 mars, Le Nozze di Figaro le 26 avril , Salome le 17 mai, et Il Barbiere di Siviglia le 31 mai.
Une occasion pour toutes et tous de découvrir quelques réalisations alléchantes du MET.
