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Ta mémé cow-boy au fest’Art de Libourne : le sound system venu de Marseille

par Farah Malaoui
16.08.2024

Cette année, la ville de Libourne a choisi une valeur sûre pour clôturer la 33ème édition de son festival international des arts de la rue à la Centrale-Médiathèque Condorcet. Plein comme un jerrican, l’édifice débordait sur son parvis d’une foule impatiente d’accueillir Ta mémé cowboy, émanation de Générik vapeur. La compagnie de théâtre musical a livré 2 heures de concert hétéroclite à l’image de la programmation éclectique de ces 3 jours qui célèbrent l’art populaire dans toutes ses formes.

L’art cosmopolite des quartiers Nord

Historiquement installée à la Cité des Arts de Marseille, Générik vapeur carbure depuis 40 ans dans la création underground en fabriquant des projets qui s’inspirent de la géographie directe des lieux et de l’élasticité du temps. Son procédé mécanique-esthétique de culture suburbaine pour mettre en scène l’ordinaire, a fertilisé cette école de rue des arts appliqués. Plasticiens, mécaniciens, électroniciens, artificiers, faiseurs de sons et d’images, c’est cette étoffe de métiers socio-culturels qui confectionne les rêves cauchemardesques de Ta mémé cowboy. Résolument contemporaine, la compagnie produit de l’art cosmopolite dans un brassage culturel affranchi des catégories de genre. Punk-rock, scénographie satirique, disco-pop masterisé et mixage techno, un sound system puissant qui fait raisonner l’écho créatif des quartiers nord.

 

L’hommage à Générik vapeur

Un écran TV géant occupe toute la scène. Devant lui des musicos en combinaison d’un orange mécanique s’installent sans regarder la foule qui s’est progressivement massée depuis le début de soirée pour assister au concert. L’ouverture est un hommage à la formation historique de Générik vapeur. Une cantatrice rock’n roll coiffée de son chignon banane apparaît et ses vocalises sonnent le départ du concert par des extraits de Bivouac et Waterlitz, créations emblématiques qui ont notamment gagné l’international. En chauffeuse de salle, Cathy Avram fait une clape efficace, son opéra-rock capte le public et le fait voyager à travers un récit conceptuel dans une langue inventée. Puis apparaît Pierre Berthelot le co-fondateur avec elle de cette compagnie, colporteur.trice irrevencieux.se de festacle en festoche. Narrateurs intergénérationnels des aberrations de presque un demi-siècle de théâtre de rue. Tous deux vilipendent fort « Tard, beaucoup trop tard » et invectivent avec fougue un « J’accuse » très contemporain que n’aurait pas boudé Zola, à l’endroit des injonctions paradoxales, maladie d’une société schizophrène qui provoque sa propre dérive. Le duo nous partage des textes d’une sensibilité concrète, comme des mises en garde inlassables issues de leurs scrutations sociales. Une énergie électrique gagne les spectateurs.

 

Ta mémé cowboy invite à sortir du cadre

Enfin, la formation de Ta mémé cowboy envahit le poste, et « débal » son Scopitone tant attendu. Derrière le voile de coton qui brouille son image, un DJ d’un autre monde, costume noir et visage d’argile, est incrusté dans l’écran géant. Ses grands yeux reflètent la lumière et balaient l’enceinte de la Centrale comme deux miradors. Il mixe de la techno et des feats intergénérationnels avec des extraits de discours surannés. Sa composition électro recouvre les émissions nasillardes des allocutions conformistes. Balayant l’écume d’une politique pré-formatée, la bande de garçons dans le vent invite à zapper sur la boîte à rythme. On change de chaîne pour le programme de la nuit. Tous grimés d’argile, les éternelles « adulescents » s’emparent du plateau en blouse blanche, référence à Vol au-dessus d’un nid de coucou. Des tubes disco sont déconstruits et recyclés dans un style alternatif, tapageur et grunge. Grosse ambiance ! Avec cette proposition singulière, Ta mémé cowboy creuse son sillon spatio-temporel et signe d’un geste décalé sa lutte artistique contre le mainstream et la culture industrielle. Un pur kiffe de liberté qui invite à sortir du cadre.

 

Tom Honnoré : Guitariste, clavier, chant et lumière
Hervé Richaud : Bassiste et chant
Pascal Ferrari : Guitariste et chant
Vincent Sermonne : Batteur, sampliste et chant
Basile De Barbarin : DJ, comédien, concepteur et constructeur
Juan Cariou : Régisseur son
Cie Ta Mémé Cow-Boy | Facebook

Crédit photoe : JIEL