Il y a des noms comme ça… quand on les lit, on ne peut qu’être attirés, curieux des informations qui les entourent. C’est mystérieux ce qui se dégage de ce patronyme échappé des années 80. Un charme lointain et pourtant si présent. Une attraction, une attirance continue. Adjani. On veut savoir, on veut voir, on veut lire, on veut tendre l’oreille. Alors, quand sort son dernier album, on ne peut que désirer le découvrir. Et là… dès les premières notes, on s’évade.
Un ensemble de cordes se manifeste, comme un vertige harmonique oriental mâtiné de sons japonais, une introduction raffinée à ces quatorze titres intrigants. Car ce qui interpelle, c’est le nombre de collaborations qui participent à faire vivre ces chansons. À la découverte de celles-ci, on peut s’émerveiller, comme rapidement devenir méfiant. D’une lecture transversale du tracklisting, on pourrait ne retenir que les noms de Seal, Étienne Daho, et Daniel Darc, tout comme on aurait pu lire ceux de Simon Le Bon (Duran Duran), Pascal Obispo et Akhenaton. Le mélange des genres commence à faire frissonner. Sur cet album coexistent donc des artistes qu’on n’aurait à priori jamais pensé voir rassemblés sur autre chose qu’un projet musical humanitaire. Pourquoi pas ? Quand on s’appelle Isabelle Adjani, on a forcément plein d’amis à travers le monde artistique, prêts à collaborer de la meilleure des façons.
Cela aurait pu être le cas.
Mais dès que les secondes défilent… on remarque une légère faiblesse dans la production. On ne la décèle pas nécessairement tout de suite. C’est dans les beats électriques, d’abord, que l’indice se niche. On est dans le genre variété, aussi on pardonne leur son peu travaillé. De toute façon la voix d’Étienne Daho participe à porter le titre Samouraï, dont la sauce prend (oui je sais elle est osée celle-là). Également, Adjani nous charme de son filet de voix aérien que l’on n’attendait pas de manière différente de ce qu’il nous est permis d’entendre. Mais hélas tous les titres n’ont pas cette chance.
On a quelquefois l’impression d’écouter des remakes, des variations de certains tubes que l’artiste a aimés. On pense au titre 7 Seconds en écoutant D’accord (avec Youssou n’Dour), et surtout à Drive (Kavinsky) sur Les Courants d’Air (avec Gaëtan Roussel qui aurait piqué le vocoder des Daft Punk). On touche le fond de la piscine avec les nombreux gimmicks vocaux de Pascal Obispo qui parsèment l’album, ces petites inflexions vocales, ces bouts de paroles susurrés entre deux vers. Car là où le bas blesse, c’est que ce dernier est partout. À la production, à la composition, aux arrangements. S’il n’y avait pas la touche inspirée de la talentueuse Cecile Delaurentis pour créer les textures de cordes qui habillent chaque œuvre, l’opus apparaîtrait sans doute bien décharné. C’est sans doute elle, la bonne surprise de cet album, encore faut-il avoir la curiosité de fureter dans les crédits de celui-ci. Autrement qu’à-t-on à se mettre dans les oreilles ? Des chansons passe-partout, sans âme, vite composées, et rapidement enregistrées. Curieux pour un album qu’on nous dit avoir été commencé il y a dix-sept ans !
Mais c’est pourtant une impression de peu de travail artistique qui se fait sentir lors de l’écoute. Déception donc. On se sent comme dans un désert proche de l’Ohio, le moral à zéro, ou presque. Reste la voix d’Isabelle Adjani, mystérieuse, unique, qui permet un voyage auditif sans heurts, mais hélas avec ces chansons-là, sans magie.
Isabelle Adjani – Bande originale (Parlophone)