Nos boîtes aux lettres se vident. Quid des cartes postales ? Quid des factures ? Quid des abonnements aux journaux ? Avis aux nostalgiques, une lettre littéraire se propose de débarquer chez vous une fois par mois.
Le plaisir enfantin n’est pas boudé quand, après un tour de clé, dans le sombre, apparaît, sous son enveloppe transparente, une lettre. On décachète ; on ouvre les battants, et on découvre la surprise : Blandine Rinkel, T9.
La Lettre Zola, fondée par Louis Vendel et Manor Askenazi, est une nouvelle mensuelle qui arrive directement, après abonnement, dans la boîte aux lettres. Ce projet épistolaire fou est mué par l’envie de renouer avec la proximité de la distribution et le désir de refondre un certain journalisme littéraire dans un objet affectif, la lettre. Chaque mois, un ou une auteur.ice livre un texte de cinquante pages dans lequel il explore de façon littéraire un sujet d’actualité.
Pour ce premier témoignage, c’est Blandine Rinkel qui prend la plume et regarde l’histoire en train de se faire et de se défaire. Avec T9, elle prolonge son premier roman, L’Abandon des prétentions, et l’histoire de sa mère, Jeanine, qui lui envoie de drôles de SMS avec son téléphone à neuf touches. Ses messages, qui débarquent dans sa poche, sont les témoins d’une relation mère-fille elliptique, les témoins de la solitude de cette femme qui remplit son temps en faisant du bénévolat dans un café associatif qu’elle appelle le Melting Pot.
À travers cette relation mère-fille, Blandine Rinkel explore un relationnel au monde tel qu’il va. Elle se questionne sur les nouvelles modalités de liens que nos téléphones nous offrent. Glissés dans la marge du texte, ces messages s’immiscent entre les lignes de la vie, et amène à se fondre entre les lignes de la vie d’autres. On fait la connaissance des figures de ce café associatif, où la précarité des uns côtoie la solitude des autres.
Tout le procédé littéraire tient en cela : le SMS. Il rend intime le récit et fait approcher le quotidien d’une femme qui est peut-être notre amie, notre sœur, notre grand-mère, notre mère, ou nous-mêmes. À cette place, on côtoie la marge. Le texte, à la différence d’un simple reportage, ne parle pas de marginalité, il la rend sensible. Ces cinquante pages créent du lien, un contact en pointillés, qui suturent nos vies, notre société aussi.
Beaucoup de jeunes auteur.ices primé.e.s, vont se prêter à l’exercice, de Mathieu Palain, à François-Henri Désérable, en passant par Maud Ventura, Joffrine Donnadieu, ou encore Line Papin. Chacun s’est prêté à l’exercice d’un journalisme littéraire qui fait le choix de ne pas rationaliser l’écriture et par conséquent les rencontres. Il ne choisit pas des mots froids, mais la chaleur de la littérature qui, entre les lignes, rend sensible les réalités.
Les illustrations sont issues du compte Instagram de la @lettre_zola.
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