Pour les sorties de la semaine, un jeune collectif catalan composé d’ancien-nes étudiant-es de l’université Pompeu Fabra (Barcelona) signe un premier film original et touchant, L’âge imminent. Sur le mode du slice of life, le film raconte l’histoire d’un jeune Barcelonais vacillant entre son devoir familial -s’occuper de sa grand-mère malade dont on s’imagine qu’il est la seule famille- et son désir naissant. On y découvre la vie d’un quartier de Barcelone et la complexité d’une jeune génération catalane, tiraillée entre ses traditions et ses aspirations.
Rencontre avec le collectif.
Collectif Vigilia : La nature collective est à l’origine même du projet. Pendant qu’on était encore à l’université, en train de travailler sur un autre projet aussi en collectif, on a envisagé de continuer à travailler avec cette méthodologie horizontale à l’intérieur même de l’industrie cinématographique. Nous avons toujours essayé, en partant de nos différences créatives, de générer une voix avec un regard particulier pour comprendre le cinéma, sans tomber dans le consensus artistique. Cela nous paraît essentiel de proposer des méthodes de travail alternatives à l’idée classique de «l’auteur» comme responsable artistique de son œuvre. De cette manière, le travail collectif visibilise la complexité et la responsabilité partagée de la proposition artistique.
CV : Le film se déroule dans le quartier ouvrier de Nou Barris («Notre quartier»), à Barcelone. Cela nous paraissait important que le film reflète le tissu associatif et culturel local, qui est surtout constitué de groupes autogérés. La batucada est un espace de libération pour Bruno, dans lequel il prend un moment pour se recentrer sur lui, à travers la musique et son groupe d’ami-es.
CV : Nous sommes parti-es avec l’idée d’utiliser le trépied pour les scènes intérieures et de tourner caméra à la main dans les scènes en extérieur. Ce dispositif nous a permis de montrer la dualité dans la vie de Bruno : dynamique à l’extérieur, connectée à sa jeunesse et suspendue d’une certaine manière lorsqu’il est à l’intérieur. Le film est aussi pensé comme une certaine prise de distance avec les personnages : on s’en sent proche sans imposer une lecture unique de leurs actions.
Pour la couleur, on voulait obtenir des couleurs vives, qui représentent la vie en mouvement que vit le protagoniste. Particulièrement, on a travaillé simultanément avec les départements de la photo, des décors et des costumes pour mettre en valeur le rouge qui accompagne Bruno tout au long du film, comme un fil conducteur en plus.
Nos inspirations viennent surtout des frères Dardenne et d’Andrea Arnold pour la manière dont on suit la vision du protagoniste, mais aussi de Claudia Weill et Celia Rico pour le ton et certains éléments au niveau de l’image.
CV : Cela n’a pas été facile. Nous savions que c’était un scénario difficile parce qu’on désirait y incorporer beaucoup de réalités parallèles d’une vie latente, mais toutes les présences nous paraissaient importantes, même lorsque ce ne sont pas des axes narratifs principaux dans le film. Le script s’est écrit de manière collective dans l’équipe des scénaristes, et même si c’est de la fiction, il y a eu beaucoup d’inspirations directes de certains moments vécus, enregistrés ou racontés, relatifs à notre vécu intergénérationnel avec nos grands-mères et nos visions de la jeunesse.