Reprenant le texte de Laurent Mauvignier, ce seul en scène déroule froidement et avec brio un horrible assassinat.
A Lyon, en 2009, un SDF se rend dans un supermarché, assoiffé. Il ouvre une canette de bière et quatre vigiles l’encerclent, avant de le conduire à l’arrière du magasin. Et de le rouer de coups, jusqu’à la mort. De ce fait divers, Laurent Mauvignier a tiré un texte en 2009 : « un ébranlement. La sensation glaçante d’une brutalité en action. » comme l’explique la metteuse en scène Sophie Langevin.
En une longue et seule phrase, le narrateur s’adresse à son ami/frère/collègue assassiné injustement. La langue de Mauvignier nous saisit, nous happe. Elle nous fait comprendre les derniers questionnements de celui qui va mourir bêtement sur le béton froid de la réserve d’un supermarché. Ce que j’appelle oubli raconte les derniers instants d’un condamné à mort, les questions qui se bousculent, la peur du regard des autres, mais aussi la relation conflictuelle avec le père, boucher, ou encore les quelques échanges avec le narrateur.
Du spectacle se dégage donc un sens aigu de la tragédie. Une mécanique implacable que rien ne pourra dérégler. Dans une scénographie très épurée (deux rideaux de bandes de plastiques, comme ceux que l’on retrouve dans les magasins), Luc Schiltz évolue seul sur scène. La voix est posée, claire, et sait se faire pressante dans les moments de tension, parfois même suppliante. Jorge de Moura, également sur scène mais à l’arrière-plan, propose une musique bien plus forte qu’un simple sound design, rappelant une musique urbaine et métallique proche de l’univers de Nine Inch Nails. Un spectacle qui ne laisse pas de marbre.
Ce que j’appelle oubli, de Laurent MAUVIGNIER, mise en scène de Sophie Langevin, avec Luc Schiltz, du 5 au 24 juillet 2025 au Théâtre le 11 à 11h45
Le Festival d’Avignon se tient jusqu’au 26 juillet. Retrouvez tous nos articles dans le dossier de la rédaction.
Visuel : © Bohumil Kostohryz