KID#1 commence par une image aussi forte que folle. Une silhouette toute bleue semble perdue au milieu d’un espace qui lui aussi est bleu. Cette couleur est, on le comprend vite, celle du blues, de la déprime. Mais déprime, c’est un petit mot. Ce que Joachim Maudet traduit, ce n’est pas de la déprime, ce n’est pas un petit coup de blues, c’est une raideur ultranoire qui dit le pire. Il dit, il ne fait presque que cela. La voix vient bien avant n’importe quel geste, comme s’il était impossible de bouger. Le texte de Romane Nicolas raconte dans les mots des enfants la réalité des cours d’école entre le primaire et le collège. Joachim Maudet, bien planqué dans un K-Way bleu et un short rouge, est toute une classe. Il est surtout Jordan. Celui qui se cache pour ne pas être emmerdé fort par des méchants très méchants.
Les thèmes, l’univers et l’intention nous ramènent aux premiers travaux de Gisèle Vienne et Jonathan Capdevielle, les marionnettes en moins. La ventriloquie donne à ce récit et à ce corps une carapace étrange, presque effrayante.
C’est au moment où le jeu n’est plus drôle que la danse se fraie un chemin, intime et subtil. Une main qui parcourt la cuisse, puis longtemps après, une course, et longtemps après, une danse presque de joie, toute cassée.
Les images et les idées fusent entre grande beauté et précision du récit. Même quand la tempête passe, qu’il est possible de s’assumer, d’arrêter de se cacher sous les couvertures, la trace de la violence reste collée là dans des coudes qui coincent et dans une langue qui se contraint à ne jamais se transformer en cri.
KID#1 est un magnifique objet, beau, tellement beau, et dur, tellement dur. Joachim Maudet ne cesse de progresser, devenant de plus en plus performeur. Il continue aussi ici son travail sur la relation au costume, si bien pensée dans Gigi, son autoportrait en solo sur le Gigi l’amoroso de Dalida qui lui aussi avait quitté son village pour partir à la ville.
Superbe.
Visuel : ©filipfoto-À voir et à danser
Le festival Artdanthé se poursuit jusqu’au 23 mars. Ce samedi, vous pourrez voir à 16 heures et à 19 heures Le poids des médailles de Bastien Lefèvre et Clémentine Maubon, très drôle et très sportif !