A l’occasion du festival MARTO, le québécois Jacob Brindamour, de la compagnie Les Sages Fous, était invité sur la scène du Théâtre Victor Hugo de Bagneux pour jouer Tricykle, un étrange spectacle de transformation peuplé d’objets mystérieux et de marionnettes attachantes.
Sur scène, un homme monté sur son tricycle tire sa remorque, il cherche sa route. Sans parler, il s’ouvre à nous et révèle l’intérieur des boîtes empilées dans sa caisse roulante. Les coffres renferment ses souvenirs et ses rêves. Nous revivons sa naissance, son premier amour, sa vie d’enfant, sa vie de forain et son évasion physique et poétique de l’industrie du spectacle. Ainsi, la remorque se transforme pour nous raconter son histoire, nous traversons son sombre passé.
Le tricycle aussi se métamorphose. Successivement, il devient grande roue de fête foraine, toile d’araignée, femme charmante et bête féroce.
L’aventure de vie qui nous est contée et les multiples métamorphoses auxquelles nous assistons marquent aussi une recherche de chemin à suivre. Dès le début du spectacle, on découvre un homme perdu qui suit de mystérieuses flèches. Puis, inventant sa propre destinée, il se délaisse de sa carte hasardeuse et choisit de nous dire adieu.
Mais avant de trouver sa voie, l’homme a traversé d’obscurs moments.
Les marionnettes à doigts et à tige semblent sorties d’un autre monde et renvoient une sensation de douce tristesse. Une des marionnettes représente l’homme, elle rejoue son passé en traversant les boîtes. Elle saute d’immeuble en immeuble, elle est vivante et attachante. Le marionnettiste manipule habilement son petit corps et s’efface pour lui donner vie.
L’homme affronte de nouveau ses peurs et, à travers cette projection, fait intervenir des marionnettes parfois effrayantes. Devant l’araignée au visage anthropomorphe, nous sommes à la lisière cauchemars. Avec ses grandes pattes squelettiques, elle se balade sur la scène et s’aventure dans le public.
Tricykle est par ailleurs rythmé par des évènements terrifiants. Entre les différentes scènes, l’homme affronte ses propres ombres et sur son visage se lit parfois une frayeur semblable à celle exprimée devant des films d’épouvante.
La partition musicale et visuelle est particulièrement étrange, nous sommes dans un monde sombre, incertain, effrayant. Cette atmosphère est également liée à la partition musicale et visuelle.
Le jeu des lumières vient donner un corps à l’histoire, il approfondit les sensations et crée une ambiance qui résonne avec la musique de Christian Laflamme.
En fond, des sons énigmatiques forment une couche de mystère. Ces derniers sont le fruit du travail d’exploration et d’invention du musicien. Christian Laflamme invente des instruments à partir d’objets trouvés pour créer des paysages musicaux particuliers et envoûtants. Il reproduit l’ambiance d’une fête foraine, imagine le son d’une roue de fortune, d’un chemin de traverse, d’un fond de cale, etc.
Cette ingéniosité musicale répond à l’imagination débordante des Sages Fous et vient servir un spectacle onirique étrange et merveilleux.
Avec Tricycle, on se laisse porter par d’étranges souvenirs sur fond de recherche de liberté. Jacob Brindamour donne vie aux personnages et métamorphose les objets pour nous conter une histoire personnelle qui invite à la recherche de notre propre lumière.
Marionnettiste Jacob Brindamour,
Mise en scène et marionnettes South Miller,
Scénographie Sylvain Longpré,
Paysage musical Christian Laflamme
Visuels : ©Patrick Simard