À l’occasion du Mois kreyol, qui fait de la France métropolitaine, des Antilles et de la Guyane un véritable archipel créole, la Dynamo de Pantin proposait le 2 novembre une soirée consacrée à Haïti.
De Haïti, on ne mentionne souvent que ses séismes, ses troubles politiques et la violence de ses gangs. C’est une autre image que le Mois kreyol a voulu en donner en réunissant pour une soirée chercheur·ses et artistes.
La star de la soirée, c’était sans nul doute Ymelda, chanteuse haïtienne, héroïne d’un film de la documentariste Laure Martin Hernandez, La Cérémonie d’Ymelda (2021). Projeté en première partie de soirée, ce film de 2022 raconte avec beaucoup de tendresse et d’humour le rapport du personnage-titre à ces figures qui la hantent, les lwas (divinités vaudou) avec lesquel·les elle communique. La réalisatrice la suit ainsi en Martinique, où elle répète pour le théâtre Tropiques-Atrium – Scène nationale de Fort-de-France Écho des divinité’es, un spectacle sur son lien au sacré, puis au Togo, où elle est officiellement intronisée vaudouisante.
Ce passage de la scène au mysticisme n’est pas fortuit : chez Ymelda, tout est étroitement intriqué, puisque son spectacle Écho des divinité’es avait pour mission de « mettre dans un théâtre classique les récits de la Caraïbe ». Le pari d’étendre le public du vaudou fut réussi, la projection ayant été suivie des nombreuses questions que le public put poser à la chanteuse.
Cric – crac. La soirée continua avec un récit conté par Jude Joseph, un mythe moderne en forme d’allégorie de la colonisation française – et de ses suites – en Haïti. Le conteur laissa ensuite place à une belle table ronde constituée de Florence Alexis, commissaire de « Oser la liberté », exposition du Panthéon consacrée aux révoltes d’esclaves, et Jean-Marie Théodat, co-auteur du catalogue de cette même exposition et maître de conférences en géographie. Les accompagnaient Nathania Periclès, scénographe haïtienne, et Jude Joseph.
L’objet de cette table ronde était de rendre justice à Haïti, de donner à voir ses différentes facettes pour éviter sa réduction au « mode fantastique ou pathétique » sur lequel elle est, selon Jean-Marie Théodat, trop souvent évoquée. Florence Alexis a ainsi rappelé la richesse qui fut longtemps la sienne avant la colonisation française, tandis que Nathania Periclès put évoquer la vitalité de sa scène artistique, avec les festivals Nègès mawon dirigé par Gaëlle Bien-Aimé, et Quatre-Chemins, mis en place par Guy Régis Junior. Une vitalité réconfortante et rassurante, qui autorise chacun et chacune à regarder vers l’avenir.
Visuel : ©Mois kreyol
Le Mois kreyol se déroule dans plusieurs lieux de métropole (Paris et en Ile-de-France, Roubaix, Strasbourg, Nantes, La Rochelle, Toulouse, Bordeaux et Marseille) jusqu’à la fin du mois et aura lieu dans les Caraïbes (Guyane, Martinique et Guadeloupe) en janvier 2025.
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