Le Sacré Sound Festival revient à Paris du 18 mai au 5 juin 2025. Le 3 juin, la chanteuse israélo-marocaine Neta Elkayam investit le New Morning pour un concert exceptionnel. Elle y mêlera jazz et héritage arabo-andalou, en hommage au pianiste Maurice Medioni, inventeur du “pianoriental”.
Le piano de Maurice Medioni racontait une histoire qui s’étendait sur près d’un siècle, transcrivant son histoire à travers ses touches : Gharnati andalou, Malouf constantinois, musique populaire chaabi qui contenait les premiers germes du raï, chants de synagogue et poésie liturgique se mêlant harmonieusement à la chanson française, à la romance espagnole et, après l’arrivée des Américains en Afrique du Nord en 1942, aux musiques afro-américaines et latines.
Né en 1928 dans une famille de musiciens du quartier juif d’Oran, en Algérie, c’est un pionnier de la musique du monde, qui a créé le « pianoriental ». Il a reçu le prestigieux BBC World Music Prize et a joué dans le film et l’ensemble El Gusto, aux côtés de musiciens musulmans et juifs. Ce groupe a célébré la renaissance de leur héritage culturel commun sur les scènes du monde entier dans les années 2000. Malgré les conflits historiques et les blessures de la guerre, la nostalgie des rues de leur enfance a uni leurs cœurs.
J’ai eu l’honneur d’être sa chanteuse pendant la dernière décennie de sa vie. Maurice m’accompagnait de son jeu virtuose, toujours patient et bienveillant, fredonnant joyeusement avec moi en arabe maghrébin. Grâce à lui, j’ai pu découvrir le monde riche de la musique juive algérienne et des figures féminines influentes telles que Reinette L’Oranaise, et Line Monty. Lors du concert à Paris, je lui rendrai hommage en interprétant une de ses compositions originales, ainsi que des chansons de ces femmes juives algériennes pionnières que j’ai découvertes grâce à lui. Ce sera un moment de gratitude pour le voyage musical que nous avons partagé et pour l’héritage inestimable de musique et de tradition qu’il a laissé derrière lui.
Les femmes juives actives en Afrique du Nord ont ouvert la voie à ma nouvelle définition de moi-même. La plupart d’entre elles avaient un nom de naissance juif, mais aussi des noms de scène arabes et français. Par exemple, Eliane Tsarfati était aussi Line Monty et Leïla Fattah. Elles ont vécu à une époque où l’identité personnelle avait encore plus d’importance que la définition nationale, et elles n’ont donc renoncé à aucune partie de leur identité, tout en préservant leur singularité personnelle et culturelle. Cela m’a inspirée sur la façon dont la musique peut dissoudre les frontières géographiques. Et lorsque j’ai commencé à chanter du fond de ma gorge, j’ai découvert une voix que je n’avais jamais connue, comme si des générations de femmes réduites au silence chantaient à travers moi.
Après avoir travaillé dans un trio électronique pendant plusieurs années, la Nouvelle-Orléans m’a appris à apprécier à nouveau le son naturel des instruments de musique. Les tambours des parades de deuxième ligne et de Mardi Gras m’ont fait imaginer comment la musique nord-africaine sonnait dans ces parades. C’est ainsi qu’Amit et moi avons réussi à créer un ensemble extraordinaire de musiciens locaux et à jouer ces rythmes avec eux, dans l’espoir de continuer à explorer un terrain commun.
Pour moi, la musique est une forme de prière. J’ai l’impression que dans chaque concert ou spectacle vivant, il y a une sorte de rassemblement spirituel, même dans les spectacles électroniques ou pop. Lorsque les gens se réunissent pour écouter de la musique avec un cœur ouvert, prêt à recevoir de l’amour, c’est l’essence même de tout cela. À mon avis, c’est ce qu’il y a de plus sacré : se connecter, aimer, pleurer et se réjouir ensemble, et s’ouvrir à la compréhension du dénominateur commun entre nous tous en tant qu’êtres humains.
La darija (arabe marocain) est mon anglais – c’est la langue de mon cœur et de mes grands-mères, et la langue qui a fait de moi une artiste internationale. C’est aussi une façon de relier le passé à l’avenir. Depuis que nous nous sommes produits à l’Institut du monde arabe, il y a eu beaucoup de nouveaux adeptes. Plus tard, certains musulmans sont venus pour la première fois au Festival Jazz’n Klezmer pour nous entendre. C’est pour des histoires comme celle-ci que je vis.
Concert de Neta Elkayam, le 3 juin 2025, 20h30, au New Morning, 7-9 rue des Petites Écuries, 75010 Paris
avec Neta Elkayam (chant, percussions), Amit Hai Cohen (piano, arrangements), Mhammed Menjra (contrebasse), Karim Ziad (batterie), Youenn Le Cam (trompette).
=> Réservations : Sacré Sound Festival sur Shotgun
=> Chaîne YouTube de Neta Elkayam
Du 18 mai au 5 juin 2025, le Sacré Sound Festival investit des lieux atypiques parisiens pour une deuxième édition placée sous le signe du dialogue entre musiques sacrées et sonorités contemporaines.
Créé par Laurence Haziza, également directrice du festival Jazz’N’Klezmer, le Sacré Sound Festival propose une programmation éclectique mêlant artistes de divers horizons culturels et spirituels. Cette année, le festival accueillera des artistes tels qu’Arthur H, Éléonore Fourniau, Neta Elkayam, le duo Sabîl avec Vincent Segal, ainsi que Walid Ben Selim et Ariana Vafadari. Les concerts auront lieu dans des lieux emblématiques tels que la Bellevilloise, la synagogue Copernic, le temple du Foyer de l’âme et l’église Notre-Dame-des-Blancs-Manteaux.
Pour plus d’informations et réservations : www.sacresoundfestival.com