Aux éditions La Ville Brûle, Louise Mey signe un roman noir adolescent qui explose comme un cri. Sainte-Marie-des-Haines-Infinies transforme un collège bourgeois en champ de bataille intime, où une adolescente harcelée prépare sa vengeance. Rage, deuil, amour et feu intérieur : un texte brûlant de nécessité, qui donne enfin un espace à la colère adolescente, et plus particulièrement la colère féminine.
Les phrases sont courtes. La syntaxe est sifflante. Les mots sont durs. La réflexion est toute faite, vengeance, il y aura. Dans ce récit où l’on suit une adolescente qui vient de perdre sa mère et qui se fait harceler violemment et quotidiennement dans son collège privé catholique et bourgeois.
La fluidité de la réflexion interne est surprenante tant l’accès aux pensées de la jeune fille est direct et intime : entre idées de vengeance et modulation de son comportement, et un amour pour ses proches bien loin de sa bulle de malheur, tout nous est donné. Le panel d’émotions nous frappe et nous libère à la fois par la force de ces pensées, existantes, enfin écrites et lisibles par des jeunes.
L’architecture du récit — construite comme un compte à rebours ternaire — nous entraîne dans une montée en tension maîtrisée, où chaque journée est à la fois une épreuve et un pas de plus vers la riposte. Et comme ça fait du bien. C’est surprenant, parce qu’inhabituel, mais rafraichissant, contemporain et salvateur.
Par ses mots, la jeune fille nous immerge dans un quotidien sombre et acerbe, où la violence verbale et physique des autres adolescent.e.s est brutale, mais véritable. En tournant les pages, voir et entendre cette rage, qui vient des tripes, qui laisse un goût amer dans la bouche, miroir d’une microsociété, reflet du monde, nous soulage. Avec « Les rêves de feu de Puta Serpente », Louise Mey offre un espace d’identification pour les adolescent.e.s.
Cette parole, féminine, est d’autant plus importante et nécessaire que le sentiment de colère et de rage, socialement associés aux personnes assignées homme à la naissance, légitimise ces émotions et permet de la sortir de soi pour la faire être, la sortir et l’exorciser. Parce que c’est ce que nous prépare l’héroïne, une vengeance cathartique, soigneusement préparée, dans les moindres détails pour enfin se faire justice. C’est ce qui la fait tenir, jour après jour, laissant une lueur de feu, entre malice et menace dans ses yeux.
Ainsi, avec Sainte-Marie-des-Haines-Infinies, le 2 mai en librairies, cette rage féminine, trop longtemps réprimée et niée, prend une forme littéraire salvatrice. Louise Mey offre aux adolescentes un espace de légitimation de leur colère, non plus comme une émotion à étouffer, mais une émotion fondatrice, mobilisatrice et féconde.
visuel : ©couverture
Sainte-Marie-des-Haines-Infinies de Louise Mey, aux éditions La Ville Brûle, en librairies le 2 mai 2025 !