Pour les quarante ans de la mort de l’écrivain italien, Gallimard publie un Quarto consacré à Italo Calvino, où fourmillent d’inventifs récits.
Parfois, l’arbre cache la forêt. Si Italo Calvino est principalement connu pour son roman Si par une nuit d’hiver un voyageur (1979), l’œuvre de l’auteur italien renferme principalement des récits. Romancier, journaliste, essayiste, éditeur, militant engagé, Italo Calvino (1923-1985) fut également résistant à partir du printemps 1944, membre de l’Oulipo lors de son installation parisienne, adhérent au Parti communiste italien (qu’il quitte en 1957), etc. Une vie bien remplie, en somme. Martin Rueff, dans sa préface, rappelle à quel point l’art de raconter, de narrer, était important pour Calvino, bien plus narrateur que romancier. S’inscrivant dans une tradition italienne de la forme courte (Boccace, l’Arioste, Leopardi) et d’auteurs ayant fait leurs preuves dans ce format (Paul Valéry et son Monsieur Teste, les petits poèmes en prose de Francis Ponge, Henri Michaux), Calvino pensait que la forme brève annule la différence entre prose et poème.
Le Quarto consacré à Italo Calvino ne rassemble donc pas les œuvres les plus connues (Si par une nuit d’hiver un voyageur, Le Baron perché, Le Vicomte pourfendu…) mais près de 200 récits. De son premier recueil (Le Corbeau vient le dernier, 1949) à son dernier publié à titre posthume (Sous le soleil jaguar, 1986), le livre se découpe en cinq parties. « Pour commencer » se concentre sur les débuts de Calvino. « Entrer en guerre » rassemble des textes inspirés par le passage à la Résistance. « Scruter le monde contemporain » observe la vie sociale et politique post-Seconde Guerre mondiale. « Inventorier les difficultés » porte une attention particulière « aux conditions sociales et politiques concrètes de notre appartenance au monde, aux lieux et aux êtres » (M. Rueff) et, enfin, « Décrire, raconter, méditer » présenter les derniers récits de Calvino, dont le très beau Monsieur Palomar. Chaque section se retrouve enrichie de textes autobiographiques ainsi que d’une courte introduction de Martin Rueff.
Spécialistes et traducteurs de l’œuvre de Calvino, Martin Rueff et Christophe Mileschi sont notamment les éditeurs scientifiques des volumes de la Correspondance, du Cahier de l’Herne, des Romans en Pléiade. Leur croyance en la prose de Calvino est grande : « En lisant Calvino, vous allez vouloir transformer votre vie, ses détails, ses élans, ses mouvements contrariés en récits. ». Il est donc fort agréable d’être bien accompagné dans ce dédale de récits aux thématiques très variées. « Si je m’écoutais, je passerais ma vie à écrire des nouvelles, écrivait Calvino. Des récits bien concentrés faits de telle sorte que si on les commence d’une certaine manière on les achève de la même manière, on les écrit et on les lit sans reprendre son souffle, ils sont pleins et parfaits, comme autant d’œufs, et si on s’avise d’ajouter ou de retirer un mot, tout tombe en morceaux. »
Récits, Italo CALVINO, Edition de Christophe Mileschi et Martin Rueff, Gallimard, Quarto, 1472 pages, 37 euros
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