Christian Bourgois éditeur a la bonne idée de rééditer en poche l’œuvre de l’auteur de Les Saisons. L’occasion de revenir sur un court roman publié pour la première fois en 1951, Métrobate, qui nous a grandement séduit.
Le schéma est classique, mais efficace : un inconnu débarque au sein d’une structure familiale et fait voler en éclat la tranquillité auparavant bien ordonnée. Si on pense au film Théorème (1968)de Pasolini ou à la pièce de théâtre Le Retour (1964) de Harold Pinter, il faudra dorénavant compter sur ce Métrobate signé Maurice Pons qui, on l’espère, fera de sa réédition un petit livre que l’on se conseillera de lecteur en lecteur.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le jeune narrateur se voit sommer de rattraper le retard qu’il a pris dû à la désorganisation des cours. Pour solution, les deux parents choisissent de faire venir un jeune professeur dans leur vaste maison de bord de mer afin de cornaquer l’adolescent de quatorze ans. Arrive alors un jeune adulte qui suscite tout de suite la sympathie et l’admiration de la famille entière. Cette bonhomie et le charme qui s’en dégage cachent pour autant un secret qu’il ne serait pas bon de révéler.
Métrobate parvient à distiller une lente tension qui convient parfaitement à cet étrange personnage du précepteur. Qui est réellement ce jeune homme qui s’habille parfaitement ? Qu’a-t-il fait durant la Seconde Guerre mondiale ? Et où s’absente-t-il lorsqu’il quitte la maison ? Publié en 1951 aux éditions Julliard, le roman aborde de biais la question de l’homosexualité, tout en sous-entendus et en ambiguïté (« je sentais peser dans son geste la marque d’une très grande tendresse et l’amitié d’un grand frère que je n’avais jamais connu »). Racontée par un enfant, l’histoire progresse insidieusement, parfaitement service par une langue classique qui ne peut que nous donner envie de redécouvrir l’œuvre de Maurice Pons.
« « Comme il est intelligent ! » me disais-je sans cesse, et je me trouvais presque fier de toucher de si près, même sans y pénétrer, à ce monde d’images et de folie qui l’habitait. Comme maman, je pensais qu’il devait avoir une façon de génie, mais que nous étions à mille lieues de comprendre.
« Ce garçon est extraordinaire » disait-on à tous les étages de la maison. Mais personne n’aurait su dire, au juste, en quoi il l’était, et en fin de compte, cela importait peu, n’est-ce pas ? »
Métrobate, Maurice PONS, Christian Bourgois éditeur, 144 pages, 7,80 euros