Maxime Rovere ou comment préserver la présence maternelle

Des fonctions maternelles multiples

Maxime Rovere part d’une question simple : pourquoi les relations mère- fils ou mère- fille sont telles si souvent difficiles ? En particulier lorsque la mère dévalorisée, ne semble vivre que par procuration, à travers ses enfants. Ou lorsque l’enfant est confronté à une dette symbolique impossible à solder, un déséquilibre insurmontable avec sa mère. Pour l’auteur, les fonctions maternelles sont multiples, elles ont une dimension cosmique dépassant la seule personne de la mère.
Les fonctions maternelles doivent circuler dans la famille que Maxime Rovere conçoit comme élargie aux proches, à nos relations, à notre environnement. En tant que système ouvert, la famille est instable, traversée par des brèches ou des défaillances qui permettent à l’individu d’acquérir son autonomie. Mais la famille est le siège d’interactions répétées qui conduisent à une régénération. Celle ci permet de retrouver la présence maternelle indispensable qui procure assurance filiale et sécurité affective.
L’auteur aborde le vieillissement et la disparition de la mère sous un angle… métaphysique. Comme la maternité, la mort de la « petite mère » a une dimension cosmique. L’anéantissement individuel est aussi une redistribution systémique. Mais lors de la sénescence maternelle, l’attention portée à un langage archaïque non verbal permettra, dans ces moments douloureux, de retrouver la présence maternelle .

L’art de la visite

Maxime Rovere est un philosophe dont les travaux ont porté en particulier sur Spinoza et sur l’éthique. Dans cet essai exigeant, il aborde les relations filiales sous un angle plus philosophique que psychologique. Le lecteur retrouvera une réflexion approfondie sur le cosmos et le temps. Il développe une transcendance dans l’immanence. Sa conception du cosmos est inspirée par celle de Pythagore : le cosmos est un agencement, une tendance organisatrice qui fait système. Il est le lieu de rencontre entre l’illimité et les limites inhérentes à la vie humaine. La maternité est ainsi traversée par le cosmos qui lui infuse un surcroît d’organisation et la mère injecte ses limites et ses défaillances dans le système.
Mais Maxime Rovère nous donne aussi des pistes pour mieux « parler avec sa mère ». La visite d’un enfant à sa mère est un moment privilégié pour restaurer la présence maternelle. Elle doit être suffisamment répétée et nécessite des qualités de respect, de tact, de patience tout en gardant sa place, en cherchant la bonne distance. Pour une mère très âgée, l’attention doit se porter sur la communication non verbale grâce au toucher, au regard, à la simple présence. C’est la qualité de l’expérience sensible qui importe. Si l’on considère la terre comme notre famille, on peut élargir le propos à l’écologie. L’engagement écologique quotidien passe aussi par la perception, la sensibilité, la répétition.
Au terme de cette immersion dans les profondeurs de la philosophie, le lecteur pourra faire sienne l’ultime phrase du livre : « On a déjà gagné quand on découvre la joie d’aimer ».