Alors que les éditions Rivages publient Membre fantôme, une nouvelle enquête du détective Kline, La Confrérie des mutilés, premier et précédent tome, se voit réédité.
Bien souvent, tout commence par un coup de fil. Kline, détective privé, se retrouve à échanger au téléphone avec deux hommes qu’il ne connait pas. Ceux-ci l’assaillent de questions sur sa récente amputation : à la suite d’un règlement de comptes, Kline s’est tranché lui-même sa main droite avant de cautériser la plaie. De quoi susciter un grand intérêt chez les deux zigotos, membres d’une secte composés de mutilés volontaires. Engagé pour résoudre un meurtre dont on ne lui montre ni le cadavre ni le lieu du crime, Kline se retrouve à évoluer dans cette étrange confrérie, entre jeux de pouvoir et rivalités.
Publié pour la première fois en 2003, La Confrérie des mutilés parvient parfaitement à dépeindre une communauté de dingues, obnubilés par l’automutilation. Au sein de cette secte, toutes les amputations ne se valent pas : Kline bénéficie d’un certain prestige en ayant lui-même cautérisé sa plaie, de même que ceux qui s’amputent sans anesthésie. Au sein de cette secte, ceux qui ont le plus d’amputations ont peu d’égard pour ceux auxquels il manque seulement un orteil ou un doigt. Engagé dans le cadre de son étrange enquête, Kline ne doit « en aucun cas aborder les détails de ce crime avec une personne ayant moins de dix amputations ».
Comme à son habitude (cf. ses déjà très bons Immobilité et Comptine pour la dissolution du monde), Brian Evenson nous livre une intrigue passionnante, cette fois-ci à la croisée de l’horreur et de l’enquête policière. Rempli de descriptions dégoutantes et de scènes d’action ultra-violentes, La Confrérie des mutilés tient autant du body horror que du film d’action. Cherchant perpétuellement à s’échapper de cet univers de fou (« Ma vie peut-elle vraiment devenir plus bizarre qu’elle ne l’est déjà ? se demanda Kline avant de refouler cette idée, de s’efforcer de l’ignorer par crainte de la réponse. »), Kline passe par l’hôpital, assassine une dizaine de mutilés et se retrouve à endosser le rôle de prophète. Un roman si délirant et si prenant qu’il a tout pour devenir culte.
La Confrérie des mutilés, Brian EVENSON, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Françoise Smith, Editions Rivages, 288 pages, 9 €
Visuel : © Couverture du livre