Publié en feuilleton dans le magazine Science Fiction World en 2003, Des dinosaures et des fourmis se voit traduit en français plus de vingt ans après.
Liu Cixin a atteint la renommée internationale avec sa trilogie Le Problème à trois corps, adapté l’an dernier en série par Netflix. Depuis le succès des trois romans, Actes Sud pioche allègrement dans le catalogue de Liu Cixin, quitte à ne pas en respecter l’ordre chronologique de parution. Ainsi du décevant L’Ere de la supernova publié initialement en 2003 et arrivé en France en 2024 ; ou de Boule de foudre, considéré comme un préquel du Problème à trois corps, traduit chez nous en 2019, mais édité en Chine en 2004. Il convient donc de séparer le bon grain de l’ivraie, et de distinguer les livres qui méritent d’être publiés, et ceux qui ne sont traduits que pour surfer sur le succès du Problème à trois corps. Des Dinosaures et des fourmis a d’abord été publié sous la forme d’un feuilleton, puis en 2004 comme une novella et enfin en 2010 comme un véritable roman.
Des dinosaures et des fourmis met en scène…des dinosaures et des fourmis. Bien des années avant notre ère, sur le supercontinent du Gondwana, un Tyrannosaurus rex se voit aider par une colonie de fourmis alors qu’un morceau de viande coincé entre les dents le gêne. Grâce à ce partenariat gagnant-gagnant (les fourmis se nourrissent, et les dinosaures voient la gêne se dissiper), l’entente entre les deux espèces va se renforcer. « C’est l’arrivée d’un tarbosaure souffrant de caries qui fit faire un grand pas en avant à la coopération entre fourmis et dinosaures. » A priori si opposées, les deux civilisations se développent et fondent chacun un empire, une histoire, une culture, des villes, des techniques, etc.
Avec cette histoire rocambolesque, Liu Cixin nous amuse beaucoup, adoptant souvent une perspective anthropomorphiste, comme cette première guerre entre les dinosaures et les fourmis, une guerre de religion sur un désaccord quant à la figure de Dieu. L’auteur chinois a beaucoup réfléchi à la vraisemblance de son histoire, et aux alliances commerciales comme aux techniques que peuvent nouer les dinosaures et les fourmis. Car chacune des civilisations a ses propres défauts : l’absence de membres habiles pour les dinosaures et un cerveau peu évolué pour les fourmis. Parfois un peu trop didactique, Des dinosaures et des fourmis s’intéresse aussi au problème de la crise climatique, les fourmis implorant les dinosaures de moins polluer. En résulte une drôle d’uchronie, originale par son thème et la précision des réflexions de Liu Cixin.
Des dinosaures et des hommes, Liu CIXIN, traduit du chinois par Gwennaël Gaffric, Actes Sud, Exofictions, 192 pages, 21 €
Visuel : © Couverture du livre