« Une table pour 2 » de Giuseppe Manunta : Pasta alla Mafia

Au premier trimestre 2021, une drôle d’histoire agitait le monde de la mafia. Un des membres de la mafia calabraise ‘Ndrangheta, activement recherché, était arrêté après avoir été reconnu grâce…à des vidéos Youtube ! L’apprenti Youtubeur qui partageait ses recettes sur le net, à visage caché, a été appréhendé à cause de ses tatouages. Mafia italienne et cuisine ont toujours fait bon ménage, comme le démontrent certaines scènes des films de Scorsese. La dernière bande dessinée de Giuseppe Manunta arrive également à marier habilement les deux.

Rosa et Marino, deux jumeaux qui se sont brouillés, sont placés sous le régime de protection des témoins : leur père, longtemps cuisinier privé d’un parrain de la mafia, a volé et dénoncé son employeur. Alors que le célèbre restaurant parisien L’International cherche son nouveau chef pour la section italienne, Rosa et Marino vont tout faire pour récupérer le livre de recettes de leur père, quitte à frayer de nouveau avec l’organisation criminelle.

Si le début de la BD est quelque peu chaotique (sept lieux abordés en moins de vingt pages !), Une table pour 2 nous intéresse vite grâce à l’enchaînement vif des situations, et aux stratagèmes des jumeaux pour retrouver à tout prix le ricettario. En plus d’être une bande dessinée palpitante, Une table pour 2 se démarque surtout grâce à l’amour qu’elle porte à la cuisine italienne. On sent à quel point l’auteur aime bien manger, celui-ci se permettant de conseiller de nombreux restaurants, de s’intéresser à des plats rarement mis en avant (« Leur palombe à la ghiotta est à tomber. C’est un pigeon farci. Après avoir séparé les pattes, le cou, les ailes et les boyaux, on hache ces parties et on les mélange avec des câpres et de l’huile d’olive. C’est sur cette préparation que le corps du pigeon est déposé, badigeonné d’huile et de romarin, puis cuit au four. ») et de partager même quatorze recettes. Grâce à ses beaux dessins à l’aquarelle, l’auteur nous fait également (re)découvrir Naples qui malgré « toute son histoire et son poids culturel, avec toute sa beauté [est] tellement désuète, inadéquate et anarchique ».