Samedi 18 mai, le Hangar Y ouvre au public l’exposition « Rayon jouets ». Accessible aux enfants comme aux adultes, elle propose une réflexion sur le jouet en tant qu’objet, le jeu comme pratique, et plus généralement sur les conditionnements qu’ils opèrent.
Sur la mise en avant du jouet comme objet marchand, et de son pouvoir de conditionnement, étant l’un des premiers contacts de l’enfant avec les produits manufacturés, pas de grande surprise. En revanche, l’ensemble est cohérent, grâce notamment à la vive scénographie de l’artiste d’origine argentine Ad Minoliti, inspirée du Bauhaus, et prend place dans un cadre d’exception. On peut aussi y trouver quelques pièces percutantes entre archives et contemporain.
Au milieu d’un parc vert de dix hectares, forestier, aquatique avec son lac artificiel et parsemé d’une collection statuaire impressionnante et d’une aire de jeu, trône le Hangar Y. Rénové en mars 2023, ses immenses baies vitrées en font un espace éclatant. En son centre, on trouve d’abord un ensemble créé par Hannah Quinlan et Rosie Hastings, composé d’une quinzaine de maisons de poupées datant de l’ère victorienne à nos jours. De la minutie des dentelles de certaines au rétrofuturisme de certaines autres, en passant par le choix de quelques meubles minuscules dans des pièces autrement vides, la tendresse ressentie d’abord est vite rappelée à l’enfermement du mode de vie périurbain. Et à l’extérieur de ces bâtisses sur pilotis, il n’y a rien. Dehors n’existe pas pour les petites filles. Encore plus explicite sont les maisons miniatures de Debora Delmar, directement encerclées d’une clôture métallique.
De quoi faut-il se protéger hors de chez soi ? Francis Alÿs expose trois de ses «camguns», avec leurs dessins. Jouant de la polysémie de shoot en anglais, qui signifie à la fois enregistrer, tourner, et évoque l’injection d’héroïne, l’artiste propose des fusils en bois et métal, où l’habituel chargeur est remplacé par des bobines de film. La caméra devient un objet d’imposition du pouvoir, une arme. D’une balle ou d’une image, laquelle est la plus violente, la plus réelle ?
Violente et en papier, notre archive préférée : la projection du dessin animé «Soviet toys» (1924) du cinéaste soviétique d’avant-garde Dziga Vertov. Composé de caricatures parues dans la Pravda, le court-métrage suit un gros bourgeois décadent, au ventre rempli de pièces (celles-ci jaillissent lorsqu’il se fait éventrer par un centaure mi-paysan mi-ouvrier). Une fois vidé de sa substance, le personnage attend dans un coin du cadre. Il est rejoint par d’autres ennemis du peuple, un prêtre, une fille légère, etc. Des petites figurines de soldats rouges s’installent en formation sapin de Noël, leur étoile brille, brille, tout en haut, et chaque personnage est finalement pendu au conifère humain – happy ending.
Mais soyez rassuré·e·s. Vous pourrez également voir un dinosaure géant chanter dans un karaoké – et apprendre que l’autotune, cette invention qui corrige et ajuste la voix après enregistrement, est née d’abord pour sonder les sols à la recherche de pétrole. Un petit train circule, occupé par des militants plutôt que les patrouilles ou marchands habituels. Des affiches séculaires de jeux de l’oie ou «des vices et des vertus» sont exposées, tout comme des gâteaux-refuges géants et de petits hochets. Une exposition réussie, où les adultes, les enfants, les adultes-enfants, pourront découvrir un dialogue entre les formats, les époques, en revisitant les “rayonnages” au musée.
Crédits photographiques © Prune Fargetton
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