Alors que les Entrevues de 2023 se finissent, le Grand Prix Janine Bazin va à O dia que te conheci, film brésilien qui s’intéresse à un quotidien perturbé.
En cette année 2023, les spectateurs de la sélection Compétition internationale de longs-métrages projetée au cours des Entrevues ont pu rencontrer des personnages, mais aussi des quotidiens huilés tout à coup perturbés, parfois de manière infime mais ultra significative à l’écran. Même chose pour le Jury chargé de départager les titres de cette sélection. Et au final, lui se laisse convaincre par O dia que te conheci de André Novais Oliveira, qui suit un homme à l’existence réglée – et déjà semi grippée – dans le Brésil d’aujourd’hui, rencontrant une personne de façon inattendue tout à coup. Il remporte le Grand Prix Janine Bazin.
Les spectateurs de la sélection, eux, accordent leur préférence à Maman déchire. La jeune réalisatrice française Emilie Brisavoine tente d’y saisir les multiples glissements d’une personne qu’elle est sensée bien connaître, elle, mais seulement a priori : sa mère. Lauréat donc du Prix du public, le film glane aussi une Mention spéciale au Grand Prix Janine Bazin.
Un quotidien nécessitant de l’engagement, pour marcher mieux : cette thématique a pu être au centre de plusieurs des travaux projetés dans le cadre du Festival cette année. Comme Education, remarquable film au cordeau d’un peu plus d’une heure, inclus au sein de la quintologie Small Axe de Steve McQueen, qui cadrait la mise de côté d’élèves noirs issus de l’immigration des Caraïbes en Grande-Bretagne au début des années 70 et fut présenté – dans le cadre de la section Cinéma et Histoire – par Jérémie Kroubo-Dagnini, docteur et spécialiste des musiques populaires jamaïcaines. Au final, le Prix d’Aide à la distribution Ciné+ part sur de mêmes chemins : il distingue Coconut head generation, dans lequel Alain Kassanda s’attache à des étudiants du Nigéria actuel ayant monté un ciné-club, devenu un véritable espace de dialogue volontiers social et engagé. Une jeunesse que d’aucuns considèrent comme trop agitée, qui trouble désormais un peu l’ordre mais de façon positive. Le film se voit distingué, donc, par un Achat de droits pour une future diffusion sur la chaîne télé Ciné+ Club.
Quant au Prix One+One, il distingue le travail sonore à l’oeuvre dans Pacheû. La réalisatrice Camille Llobet s’y penche sur le massif du Mont-Blanc et la manière dont il témoigne de changements climatiques, en suivant deux groupes de personnes y opérant.
On retrouve au final ces mêmes axes du côté des récompenses remises aux courts-métrages, alors que ces Entrevues de 2023 arrivent à leur terme. Si le Prix du public couronne Losing ground, qui cadre le coup d’Etat militaire en Birmanie survenu en février 2021 – et n’est pas signé, pour éviter de graves ennuis à ses auteurs – le Grand Prix André S. Labarthe va à An Asian ghost story, de Bo Wang, qui traque l’histoire du passé impérial chinois du début du XXe siècle et ses bouleversements en partant d’un élément commun, les cheveux. En l’occurrence ceux ayant servi à composer des perruques, conservées ensuite.
Et surtout, une Mention spéciale à ce Prix va à Uje. Jean-Luc Mitana y observe de quelle manière un mariage dans le Rwanda d’aujourd’hui se trouve perturbé.
Si le Prix Gérard Frot-Coutaz – allé cette année à Astrakan de David Depesseville – couronne un long-métrage déjà sorti, pour sa qualité de premier long excellent signé par un cinéaste français, d’autres récompenses sont adressées à des films en développement. Le Prix Films en cours est remis à Festa Major, dans lequel Jean-Baptiste Alazard s’intéresse à une célébration ayant lieu depuis 125 ans dans les Pyrénées Catalanes et fédérant absolument tous les habitants de cette zone.
Et les lauréats du parcours Nouveaux talents sont les projets Résurrection de Bilel Belmahdi et Dream machine de Timothée Gutmann. Tous deux se centrant sur des jeunes s’en remettant à leurs rêves pour retrouver leur passé ou leur amour. Pour des scénarios qui promettent de montrer des quotidiens plus que jamais dépassés par une jeunesse qui ne se résigne pas.
Visuel : Maman déchire (c) Bathysphère