Ce jeudi 11 janvier a ouvert la 6e édition de Festival du Film politique de Carcassonne, en présence de Vincent Lindon, de Stéphane Brizé et des deux fondateurs du Festival, Etienne Garcia et Henzo Lefèvre. Le film d’ouverture était âpre et fascinant, il a d’ailleurs eu le Grand Prix à Cannes : La zone d’influence de Jonathan Glazer.
Chaque année, l’on sent bien que reconduire le Festival du Film Politique à Carcassonne est un enjeu, malgré la ferveur du public qui remplissait le Dôme pour l’ouverture. Le maire était d’ailleurs ravi de déclarer ouvert ce festival à la fois cinéphile et engagé, de même que les représentants de l’agglomération et de la Région.
Mais le cœur de cette cérémonie d’ouverture de près d’une heure trente était le discours de Vincent Lindon qui rempile ce vendredi 12 pour une masterclass généreuse avec Régine Arniaud. « Jusqu’à l’an dernier je n’avais pas réussi à revenir, depuis que je suis venu, c’est le contraire, je ne peux pas ne pas venir ». Il a d’ailleurs convaincu le réalisateur Stéphane Brizé de venir également cette année comme Président du jury et aussi pour présenter en avant-première ce qui pourrait bien être le moins politique de ses films : L’Arrière-saison avec Alba Rohrwacher et Guillaume Canet.
Bien que présentée comme mission impossible, l’intervention de Vincent Lindon : « Se taire, ravaler son indignation devant les promesses trahies, les inégalités qui se creusent », n’est pas une option pour l’acteur, qui a ajouté qu’aucune « innovation sociale ne s’est produite sans l’action d’une avant-garde concernée ». Présentant sa génération comme celle qui ne refera pas le monde, qui permettra « d’empêcher que le monde se défasse », il s’est fait le défenseur des artistes – et d’un public – engagés.
L’intervention à distance de Ken Loach, coincé chez lui à cause d’un bobo à la patte a été étonnamment longue et aussi très généreuse. Le réalisateur anglais nous a fait un cours d’histoire sur la lutte des classes – qui demeure – et l’État-providence qui a apporté une éclaircie mais qui est menacé. Il a aussi mis en avant ses équipes et notamment les auteurs avec qui il travaille. Il fera bien sa masterclass demain matin à 9h30 et à distance.
C’est donc après l’intervention de Stéphane Brizé et assez tard que la projection de la Zone d’intérêt de Jonathan Glazer a eu lieu. Cette adaptation des mémoires du commandant d’Auschwitz, Rudolf Hoess nous laisse voir le quotidien de sa famille bourgeoise à quelques centimètres des chambres à gaz. La mise en scène est saisissante, Christian Friedel est extraordinaire en père aimant et en stakhanoviste de la mort de masse et faisant sortir son épouse de l’ombre, Sandra Hüller est abjecte au possible. Le film choque, interpelle, pose plein de questions. Nous l’avions chroniqué à Cannes, où il a eu le Grand Prix. Pour l’heure il est utile de préciser que peu de festivals l’ont finalement passé et que cela donne beaucoup d’audace à CitéCiné.
La soirée s’est terminée dans la ville haute dans le cocon de l’Hôtel de la Cité où le menu cinq étoiles nous a permis de sortir de l’état de choc dans lequel le film de Glazer nous a précipités. Rendez-vous demain pour plus de films et de… politique.
Visuels (c) YH