Le deuxième volet des Vives le sujet ! Tentatives, le programme conjoint de la SACD et du Festival d’Avignon, rassemble deux pièces qui ont en commun de regarder nos sociétés qui collapsent. La première proposition, Born Again de Yasmine Hadj Ali, Antoine Kobi, Ike Zacsongo-Joseph, met un coup de pied dans le grand jeu du périscolaire, et Quelle aurore de Soa Ratsifandrihana et Bonnie Banane se demande comment tenir bon dans une époque instable.
Antoine Kobi, Ike Zacsongo-Joseph et Yasmine Hadj Ali sont artistes, comédien·ne·s, et pour Ike, également danseur et chanteur. Samah Karaki, elle, est neuroscientifique. Enfin, on le sait parce qu’on le lit, car ce quatuor à l’air si cohérent ne laisse pas apparaître qu’un·e de leurs membres n’est pas interprète de profession.
Au début, Ike Zacsongo-Joseph et Samah sont en bord de scène. Lui parle, elle réajuste, pour donner de la vérité à ce qui semble limpide. Il parle du centre de loisirs, de la fin d’été, elle recadre, non, tout ne se passe pas bien. Et là, doucement, une activité se met en place. Une partie de gamelle, un genre de ballon prisonnier si vous préférez. Les règles sont militaires, ultra cadrées, pour masquer le naufrage dû au manque de moyens. Le drame arrive, un enfant disparaît. Ce fait divers pointe les failles d’un système qui craque, et fait craquer les gens qui y travaillent.
Les allégories se multiplient. Les prisonniers ne jouent plus, ils sont vraiment enfermés pour des faits non commis, du fait de la violence raciste. Une autre pensait finir sa carrière tranquille, et la voilà face aux flics, sur le plateau du jardin de la Vierge transformé en scène de crime. La mise sous pression de la directrice, campée par Yasmine Hadj Ali, fait tout exploser.
Cette proposition a tout d’un vrai spectacle déjà articulé, où le théâtre nous plonge dans le récit immédiatement. On y croit, on dévore leur présence sur scène, et on rit jaune face au démantèlement toujours plus profond du service public.
Pour cette deuxième proposition, on voit débouler un duo plus cool, tu meurs : la chanteuse underground Bonnie Banane et la danseuse Soa Ratsifandrihana (qui a longtemps dansé chez Anne Teresa De Keersmaeker, avant de chorégraphier à son tour). Elles sont habillées en vintage Y2K, jupette sur short, couleurs fluo, et surtout, téléphone vissé aux mains. Elles se matent, se selfisent, prennent la pose, et commencent à scroller à tout-va sur leurs comptes, qui reflètent l’air du temps.
On entend résonner, et c’est délicieux, le générique culte du compte du Tréma, « Est-ce que les hétérosexuels vont bien ? », qui pointe du doigt les masculinistes pour nous alerter et nous divertir. Puis, une vidéo les cloue sur place, seulement quelques minutes : il s’agit d’un témoignage sur la guerre à Gaza. Les infos chassent les infos, et les deux jeunes femmes sont désemparées face à cette époque.
Elles avancent à contretemps, sur des tapis roulants (quelle idée géniale), et tentent malgré tout de rester joyeuses, cool et sexy. La rencontre entre elles est totale, Soa chante, Bonnie danse. Évidemment, les moments où Soa se met en mouvement sérieusement sont fascinants de dextérité et de finesse.
Deux propositions cohérentes qui pointent l’air du temps dans ce qu’il a de plus vicié.
في « Born Again »، يتناول أربعة فنانين، من بينهم عالمة أعصاب، انهيار النظام المدرسي من الداخل.
من خلال لعبة بسيطة تتحول إلى مأساة، تكشف المسرحية عن عنف بنيوي وإرهاق العاملين في القطاع العام.
العرض يجمع بين الواقعية والرمزية، ليعكس قسوة مؤسساتنا اليومية.
In Born Again, four performers — including a neuroscientist — expose the collapse of the school system from within.
What begins as a children’s game turns tragic, revealing systemic violence and the burnout of public service workers.
A powerful mix of realism and metaphor drives this gripping theatrical piece.
🇦🇪 عربي :
في « Quelle aurore »، تستعرض بوني بانان وسوا راتسيفاندريهانا عبث العصر الرقمي.
يتنقلان بين الضحك والقلق بينما تُسحق الأخبار المأساوية وسط الاستعراضات الذاتية.
يتحول الرقص والغناء إلى محاولة للبقاء في عالم على وشك الانهيار.
🇬🇧 English:
In Quelle aurore, Bonnie Banane and Soa Ratsifandrihana explore the absurdity of the digital age.
They oscillate between laughter and unease as tragic news scrolls by in a sea of selfies.
Dance and music become a way to survive in a collapsing world.
Du 16 au 19 juillet à 10H30 et 18h au Jardin de la Vierge du lycée Saint Joseph
Le Festival d’Avignon se tient jusqu’au 26 juillet. Retrouvez tous nos articles dans le dossier de la rédaction.
Visuel : © Christophe Raynaud de Lage