L‘Épée de bois accueille jusqu’au 12 mai une adaptation scénique du livre de Jean Hatzfeld Une Saison de machettes. Une proposition qui a le bon goût d’éviter les facilités d’une mise en scène trop fastueuse et laisse les témoignages des criminels – puisque ce sont eux qui parlent – dire l’horreur de la dynamique génocidaire.
Ils s’appellent Fulgence, Adalbert ou Pancras et ont tué, avec obéissance ou férocité, leur « avoisinants » qui avaient pour seul tort de naître tutsis. Des voisins qu’ils côtoyaient tous les jours, et avec qui ils partageaient leurs tourments de cultivateurs.
Pourquoi ont-ils tué ? Il leur est difficile de répondre, et en même temps l’explication est très simple : à côté de l’incertitude des travaux des champs, « la chasse » leur apparut comme une période de stabilité et d’abondance, leur statut de tueurs leur donnant accès à des magasins où ils n’auraient jamais songé entrer auparavant. Une saison « chanceuse » que cette saison de machettes, où la fierté du chasseur supplante le labeur du paysan.
La mise en scène de Dominique Lurcel évite la confrontation avec des images trop crues. L’idée n’est pas tant de choquer que d’inviter, à travers les exemples relatés, à réfléchir à cette « banalité du mal » dont sont pavés les génocides. Ainsi, les quatre auteur.rices disent, face public, des extraits du livre, tandis qu’un musicien les accompagne par instants des graves accords de son violoncelle.
En dépit de quelques hésitations, cette Saison de machettes parvient à maintenir l’attention des spectateur.rices sans effets superflus. Surtout, par la simplicité et la sobriété de la mise en scène, elle contribue à maintenir vivante la mémoire du génocide rwandais.
Une Saison de machettes, d’après le livre de Jean Hatzfeld, mise en scène de Dominique Lurcel.
Au Théâtre de l’Épée de bois jusqu’au 12 mai.
Visuel : ©Les Passeurs de mémoire