À la MC93, David Geselson s’approprie le protocole de sobriété de Katie Mitchell pour évoquer notre responsabilité envers les vivant.e.s. Un spectacle, hélas trop didactique pour nous éclairer sur l’actuelle extinction de notre espèce.
En 2021, la metteuse en scène britannique Katie Mitchell conçoit un spectacle à Vidy-Lausanne selon un dispositif précis : il ne voyagera pas, mais pourra être joué partout dans le monde ; il sera sobre et se jouera sans électricité ; il sera interprété par une femme non issue de la majorité visible de son pays. Cette démarche s’inscrit dans une prise de conscience croissante de notre perte, à l’instar de Jérôme Bel qui, en ce moment même à la MC93, joue son autoportrait dont les spectacles ne voyagent plus.
Juliette Navis se présente à nous, éclairée seulement par la faible lueur d’une lampe à huile. L’image est belle, évoquant une peinture de Georges de La Tour. L’actrice raconte une fausse histoire de spectacle à gros budget annulé pour des raisons familiales. Puis, dans la scénographie magnifique de Jérémie Papin, où les miroirs multiplient les flammes, elle entame un cours mêlant grande (pré)histoire et récit intime sur notre disparition prochaine.
Malgré sa beauté, Une pièce pour les vivant·e·s en temps d’extension ne décolle pas. David Geselson, pourtant capable de manier avec brio le grand et le petit, l’intime et le collectif, ne parvient pas à insuffler son talent dans le texte trop facile de Miranda Rose Hall. Les anecdotes personnelles sur la mort de la mère, les pleurs face à la disparition des chauves-souris et sur Vanessa, le dinosaure en peluche, ne parviennent pas à faire écho à l’angoisse de participer à l’extinction en cours.
Au fil de l’heure de monologue, le texte devient trop pédagogique et s’enlise dans la grandiloquence. Il se termine littéralement par les bras en l’air et un appel à mourir en paix. Échouant tant dans la sobriété que dans l’intention de toucher l’intime, le spectacle peine à nous relier à la catastrophe. Il ne suffit pas de nous appeler à la conscience écologique : il faut également nous proposer des moyens d’agir, tant esthétiques qu’artistiques. Patricia Allio, par exemple, sait pertinemment mettre son public en marche politique. Tout comme David Wahl, dans un autre registre, nous fait réagir par l’humour.
Malgré de jolis moments légers, le jeu reste monocorde, tout comme la partition de violoncelle. Le spectacle ne parvient pas à atteindre son but de devenir un acte sensible.
Jusqu’au 7 avril à la MC93
Visuel : ©Simon Gosselin