Ses souvenirs remontent par touches successives et se percutent dans sa mémoire. Quand est-ce qu’elle a commencé à avoir mal ? Évoquant ses premières fois et les humiliations de l’enfance, la comédienne et auteurice Lou Chauvain nous offre une plongée dans l’intime et un seul en scène vibrant entre théâtre, stand up et chansons.
Il y a du lâcher prise dans ce spectacle et une bonne dose de culot. La magnétique Lou Chauvain, qui a déjà derrière elle plusieurs dizaines de pièces de théâtre et de films en tant qu’actrice, a décidé de s’isoler pendant une semaine dans une cabane pour écrire. En chemin, elle tombe sur un vieux journal intime. Coïncidence ou pas, les textes qu’elle commence à écrire tournent beaucoup autour de la peau. Depuis toute petite, Lou est très angoissée et ça se manifeste par des démangeaisons. Encore un autre hasard, sa grand-mère est enterrée à Sète, dans le cimetière marin où repose Paul Valéry, qui parle lui aussi beaucoup de la peau. Il n’y a plus qu’à remonter le fil…
Est-ce que c’est au moment de ce mémorable cours de natation synchronisée ? Ou quand un camarade de classe a traité sa mère de salope ? Quand est-ce que ça a commencé exactement, cette souffrance ? Pour en venir à bout, Lou tente de s’échapper dans un monde imaginaire. Elle s’invente une vie rêvée où elle serait impératrice, comme Romy et où elle aurait un amoureux. Le réel la déçoit toujours. Sa silhouette frêle tangue d’un bout à l’autre du plateau comme pour tenter d’exorciser ce mal qui la ronge, cette douleur qui s’est immiscée sous sa peau. Elle voudrait l’apprivoiser, plonger dedans, pouvoir lui parler. À la surface, ses parents se séparent. Lou, elle, ne dort jamais vraiment tant le monde qu’elle a tissé « sous ses paupières » la raccroche à la vie.
Elle chante son désespoir. Des chansons comme des moments de grâce, composées par Pascal Sangla, qui prennent le relai d’un récit éclaté comme peut l’être la mémoire, un puzzle qui composera petit à petit un tableau saisissant. Dans sa note d’intention, Lou Chavain explique : « ce spectacle, je le voudrais comme un pacte avec le public. Ce public qui devient complice et vient me rejoindre sous les paupières ».
Les derniers instants du spectacle sont comme suspendus, un moment doux et hors du temps, où la comédienne va à la rencontre de ses aïeux, et semble, elle même, ne plus avoir d’âge. L’émotion est palpable. Le talent aussi.
Sous les paupières, de et avec Lou Chauvain, au théâtre du Train Bleu, dans le cadre du festival off d’Avignon, du 5 au 24 Juillet 2025, relâche les 11 et 18 Juillet.
Visuels : © Antoine Vincens de Tapol