Hier soir, in situ et hors les murs, le Collectif Marthe a mis un coup de projecteur sur l’histoire des luttes féministes en traversant les films de Carole Roussopoulos. Tendre, nostalgique et militant.
Aurélia Lüscher et Itto Mehdaoui nous attendent sous la voûte trouée du Consulat. Des coussins au sol, des canapés, des chaises sont disposées face à un espace de jeu composé de tapis, de tentures, d’une table basse sur laquelle est posé un ordinateur et surtout un rétroprojecteur constituent tout ce qui peut faire voir et entendre les combats de la vidéaste et féministe Carole Roussopoulos. Aurélia Lüscher, souvent filmée de dos, incarne la réalisatrice suisse en train de filmer Itto Mehdaoui, véritable caméléon qui représente les militant.e.s des différentes luttes qu’elle a suivies.
Cette pionnière de la vidéo a réalisé plus de 120 documentaires. Le Collectif Marthe a donc fait des choix parmi ce corpus immense. Les ouvrières de Lip, les filles du MLF, les gays du F.H.A.R croisent la vraie vie de la cinéaste, maman, mariée qui grandit et évolue en même temps que les cameras deviennent de plus en plus portables. La forme de la pièce est du pur documentaire comme le veut l’époque. Nous vous parlons régulièrement de cette grande tendance qui voit la fiction être repoussée sur le côté, chassée par des histoires vraies, forcement, plus intenses, plus organiques. Il est intéressant de constater la diversité des formes que peut prendre le théâtre documentaire. Cela va du théâtre classique de Julie Deliquet qui fictionne un documentaire sur les centres sociaux dans Welfare, au théâtre de témoignages de Patricia Allio dans Dispak Dispac’h qui rassemble des paroles de migrant.e.s et de militant.e.s pour la libre circulation des humain.e.s. Ici, nous sommes exactement entre les deux. Les deux comédiennes jouent l’archive, mais la font également entendre.
Au début du spectacle, le duo nous dit que Carole Roussopoulos se définissait comme une « passeuse », et c’est exactement ce que fait le Collectif Marthe : il passe le flambeau. Le poing levé devient une caresse, une invitation à militer avec amour. La lutte rassemble, elle colle au corps. On y est, on imagine, on a la sensation, nous aussi, d’avoir été là dans cette manif-là. Avec Rembobiner, le Collectif Marthe nous montre les origines et les formes de nos luttes d’aujourd’hui pour une égalité entre les femmes, les hommes et tous les genres possibles et aussi pour rester en éveil face aux démantèlements successifs des services publics. C’est une pièce documentaire très pédagogique qui manque malheureusement de forme. Même in situ, comme le fait par exemple Gwenaël Morin, il est possible de gagner en esthétisme, de faire attention à ses regards et à ses voix. Malgré ce bémol, Rembobiner est un joli moment de théâtre qui fait du bien et qui donne envie d’en savoir bien plus sur Carole Roussopoulos.
25 et 26 avril.
Hors les murs du Théâtre de la Bastille-Le Consulat,14, Avenue Parmentier,75011 Paris
14h30 et 19h
Visuel : © Theatre du Point du Jour