Il vous reste seulement une possibilité pour voir Qu’il fait beau cela vous suffit pendant le Festival Off d’Avignon et il faut saisir cette opportunité ! Un spectacle bouleversant sur le quotidien des établissements scolaires classés en réseau d’éducation prioritaire qui donne la parole aux personnes qui le vivent de l’intérieur. A découvrir au Théâtre du Train Bleu ce mardi 25 juillet.
Alors que le public s’installe, une reprise de « Génération désenchantée » est perceptible. Elle est là, tel un murmure dont on peut faire abstraction mais qui reste présent malgré tout. Il suffit d’y prêter l’oreille pour qu’il s’étoffe et s’impose, à nouveau. Le murmure qui perdure est à l’image d’une réalité sociale laissée de côté : celle des établissements scolaires classés en réseau d’éducation prioritaire (REP). Qu’il fait beau cela vous suffit met l’accent sur cet environnement scolaire dont l’Éducation Nationale ne parvient pas à en apaiser les maux, les souffrances et les violences. Un système enfermé sur lui-même porté à ébullition. Et il faut savoir que « tout le monde ici est susceptible d’exploser ».
Cette pièce est une succession de scènes donnant la paroles aux élèves, aux professeurs et aux équipes pédagogiques. Pour l’écrire, les co-autrices et metteuses en scène ont récolté pendant près de deux an des témoignages divers. Cette volonté de faire une « écriture d’un théâtre du réel documenté » est propre à la Compagnie Les Entiché.e.s et permet d’inscrire profondément leurs créations dans le monde contemporain et de mettre au grand jour des problématiques actuelles.
En partant de cette base de travail, Mélanie Charvy et Millie Duyé ont créé un spectacle aux scènes éloquentes et justes. On est pris dans une écriture à la fois profonde et absurde qui nous fait « passer du rire franc aux larmes lourdes ». Rire de désespoir est un moyen de ne pas nous faire sombrer, c’est une respiration dans un tourbillon qui nous faire perdre la tête.
Sur le plateau, ils sont huit comédien.ne.s à interpréter plus d’une vingtaine de rôles. Ils sont à la fois députés, ministres, professeurs, CPE, directrice, élèves et parents et évoluent au milieu d’un décors constitués de 7 châssis en bois « sur lesquels sont apposés du mirolège (miroir sans teint) ». La scénographie permet de multiplier les espaces, modulés de surcroit grâce aux lumières. Le mirolège accentue les effets visuels, les reflets et les transparences et rend les lieux chaleureux ou hostiles.
Dans cette galerie de personnages se détachent des individus que l’on apprend à connaitre et qui nous touchent pas leur vécu. Ils sont fatigués de leur quotidien, épuisés, prêts à craquer. La voix d’un élève de 3e, Alexander (magnifiquement joué par Étienne Toqué), s’élève au dessus des autres. Il parle pour lui, pour les autres, lui qui a perdu espoir en la vie à tout juste 15 ans. Sa réalité nous frappe en plein visage, lui qui ne dit pas les mots « qui les garde dans ses dents, ces mots de peur qu’ils signifient ».
Qu’il fait beau cela vous suffit est bien trop beau pour suffire, un cri de révolte nécessaire qui dit sans défaillir, une pièce magistrale et capitale qui nous surprend par sa portée vitale.
Au Train Bleu du 7 au 25 juillet à 12h40 les jours impairs. Relâches les jours pairs.
Visuel : ©Christophe Raynaud de Lage