Que reste-t-il de l’enfance ? Tout, y compris des vers de terre et des flaques rebelles, nous dit Patrick Corillon, plasticien, comédien, metteur en scène et magicien de la forme. L’artiste belge propose à 11h et 18h à la Chapelle des Pénitents un portrait de lui en deux épisodes, quatre spectacles et beaucoup d’histoires… Attention bijou!
Artiste touche-à-tout et surtout narrateur délicat le plasticien Patrick Corillon, représenté à Paris par la Galerie In Situ-Fabienne Leclerc présente à Avignon, un condensé de son travail de théâtre d’objets de 2013 à 2023. Dans le premier des deux volets qu’il interprète avec Dominique Roodthooft à la chapelle des pénitents blancs, il commence par raconter l’histoire de « L’appartement à trous » avant de faire participer le public à un « Voyage dans la Flaque ».
Le monde est un récit…
Tout commence avec l’empreinte de la cellule où Vladimir Maïakovski a passé ses derniers jours au Goulag. Dans les rainures du sol, le poète russe érigeait des papiers qu’il griffonnait et avec lesquels ils pouvaient mettre en scène des histoires pour lui et ses co-détenus. Cette empreinte a été acquise via le web et permet à l’artiste-narrateur fasciné par les langues de se mettre lui aussi à créer un support qui lui permettra de transmettre des mots. C’est une table assez magique, où il pose ses images inspirées par le suprématisme russe, des dessins parfois illuminés de grandes surfaces de couleurs. Et il partage avec nous la manière dont il a démontré, avec l’intensité et la puissance d’un enfant, que chaque langue naît dans un élément : l’anglais se grave dans la pierre, le français ce sont les fleuves, le polonais les bois et le portugais, les fleurs…Cet autoportrait réjouissant et réflexif est un miroir que l’artiste nous tend… Volontiers dans l’autodérision, se déboulant en son meilleur ami Fabrice qui incarne le principe de réalité, Patrick Corillon est tour à tour un vers et un « ermite ornemental » (quelque chose entre le nain de jardin et le philosophe de salon!). En nous faisant entrer dans son univers, il nous parle à l’universel, dans un genre qui défie les modes et le temps…
De l’autre côté du miroir
A l’entracte, lorsque le rideau se lève une autre salle se révèle, avec des chaises et des petites lampes à mettre autour du cou. C’est féérique, d’autant plus que Patrick Corillon partage en deux le public et nous donne une très jolie calligraphie iranienne à manipuler pour suivre la narration de Dominique Roodthooft qui nous emmène comme des enfants dans l’histoire de la flaque qui ne veut pas se laisser tarir. La tonalité très didactique change, et c’est dommage car c’est visuellement sublime mais tranche intellectuellement avec la première partie…
Deux autres « histoires » font partie du Portrait de l’artiste en ermite ornemental : les images flottantes et Le dessous-dessous se donnent les 10, 11 et 12 juillet à 11h et 18h.L’appartement à trous et le voyage de la flaque se donnent encore samedi 8 juillet à 11h et 18h.
visuel : (c) Le Corridor