Maya Bösch porte l’exil de Velibor Čolić au T2G

Au commencement, nous raconte Velibor Čolić : « Manuel d’exil est un roman. Et j’aimerais surtout que ce texte soit lu, traité, aimé ou détesté, comme tel. Comme un roman. La scène de théâtre est une autre lecture, une autre chair et un autre souffle par lesquels passe mon texte ».  Cette autre lecture, justement, c’est Maya Bösch qui la réalise, au plus près des mots, sans trahir le flux précis des 35 leçons que composent ce manuel très précis. Nous rencontrons une voix, celle assurée et directive du comédien. Il est là, campé au sol, entouré de néons qui vacillent autant que son identité piétinée. Lui le poète, le lettré qui devient à Rennes un ignorant.

«(…) Mon âme est un loup solitaire qui mord les roues des voitures de luxe (…) »

Nous avançons, du départ à la reconstruction de soi, dans ce parcours qui est à la fois universel et particulier. Tous et toutes les exilé.es racontent la même histoire, celle d’un arrachement viscéral, qui se transmet.  Et pourtant, chaque récit est singulier. Manuel d’exil est un spectacle, subtil et radical dans sa forme et dans son fond.

Il ne faudrait pas le voir ni comme une lecture, ni comme un témoignage. C’est un roman, et qu’il soit basé sur des faits réels n’enlève rien à sa puissance fictionnelle. Alors que raconte cette histoire ? Nous partons avec « lui »  qui ne bouge plus, ne voyage plus, ne migre plus dans son retour vers son humanité, vers son statut d’intellectuel. La précision de la mise en scène cohérente avec les mots ciselés portés par la diction sans faille du comédien fait de Manuel d’exil un grand moment de théâtre.