Pour la troisième fois depuis sa création, Cult s’est intéressé à l’adaptation que fait Joël Pommerat de la pièce de Marcel Pagnol, premier volet de la célèbre « Trilogie marseillaise ». Pour rappel, elle est née du travail de l’auteur-metteur en scène en milieu carcéral. Cette version toute en retenue repose en grande partie sur le jeu délicat de ses interprètes (la distribution mêle acteurs professionnels, et anciens détenus) dont certains ont découvert le théâtre en milieu carcéral.
L’histoire est transposée dans un monde contemporain, il faut rappeler que Marius avait été créé pour le théâtre au début des années 1930. Plus d’un siècle plus tard, César et son fils Marius ne tiennent plus un bar mais une boulangerie qui fait aussi café. Fanny, elle, n’est plus marchande de coquillages mais elle aide sa mère au salon de coiffure d’à côté. Mais le fond de l’intrigue reste la même : Marius rêve de contrées lointaines et Fanny, courtisée par un vieux soupirant, veut attiser sa jalousie. Le jeune homme est tiraillé entre son devoir de fils, son amour pour Fanny et son désir d’évasion.
Le mot n’est pas choisi au hasard, il fait écho à l’enfermement et au désir d’ailleurs des détenus, qui se traduit pour certains, explique Joël Pommerat par « cette intense volonté de faire du théâtre, la nécessité d’un temps, d’un espace, d’une nouvelle scène ».
En s’éloignant du texte de Pagnol et grâce aux libertés prises dans le jeu (basé sur un travail d’improvisation avec les détenus), Joël Pommerat gomme le côté ostentatoire des acteurs de la pièce de Marcel Pagnol à commencer par César, dont Jean Ruimi, qui a participé à la création de la pièce, que nous avons vu au Printemps des Comédiens, s’empare magnifiquement. Cette collaboration entre le metteur en scène et les détenus de la Maison centrale d’Arles débute en 2014. De ses ateliers, est née une véritable troupe, dont certains deviennent des acteurs réguliers de la Compagnie Louis Brouillard créée par Joël Pommerat. Un conte moderne et émouvant.
Marius, mis en scène par Joël Pommerat, jusqu’au 28 septembre 2025 au théâtre du Rond Point, puis à la Ferme du Buisson dans le cadre du Festival d’automne les 18 et 19 décembre 2025, et la Zef, scène nationale de Marseille du 8 au 12 janvier.
Visuel : © Agathe Pommerat