Depuis sa création, le festival A Corps reçoit régulièrement des têtes d’affiche. Maguy Marin et sa compagnie font partie des têtes d’affiche de l’édition 2025 du festival de danse. Cela étant dit, la pièce « 2023 » est une pièce de théâtre plus qu’un spectacle de danse ; mais c’est bien Maguy Marin qui a monté ce spectacle original dans lequel les textes lus ont été écrits par leurs lecteurs.
Les responsables du Théâtre Auditorium de Poitiers et les coorganisateurs du festival A Corps, l’université de Poitiers et le centre d’animation culturel de Beaulieu (l’un des quartiers de Poitiers), ont vu juste en invitant Maguy Marin et sa compagnie ; en effet le succès pour ce spectacle original, mais qui peut paraître dur a été immédiat. Cela étant dit, la manifestation poitevine qui célèbre sa trente et unième édition, présente de nombreux spectacles qui méritent l’attention.
Chorégraphe et danseuse populaire et très appréciée, Maguy Marin (maintenant âgée de 73 ans) ne danse plus depuis longtemps, mais poursuit avec un plaisir gourmand son travail de chorégraphe. Pour 2023 , comme dans Y aller voir de plus près en 2021, il n’y a pas de chorégraphie au sens traditionnel du terme puisque le spectacle ouvre, après la chute d’un grand mur de legos (faute d’un meilleur terme), sur une ronde de sept danseurs qui se « transforme » en farandole ; le tout durant à peine une ou deux minutes. La musique accompagnant cette courte danse est Les lecteurs, qui sont aussi les danseurs de la compagnie, ont écrit des textes très politisés pour dénoncer qui la dictature (aussi bien en Russie qu’en Argentine ou ailleurs dans le monde), qui le racisme, qui l’antisémitisme. Mais pas que puisque les danseurs acteurs évoquent aussi Napoléon 1er, Gérald Darmanin (et ses affaires de viols pour lesquelles il est bon de rappeler qu’il a été relaxé), Bruno Retailleau … Autant de sujets pris à bras le corps évoqués tour à tour que le lecteur soit dans la lumière ou en fond de scène ou installés dans le camion tandis que des petites mains rangent les pièces du mur effondré tout en faisant de menus travaux (les coups de marteaux amplifiés par les micros installés sur la scène sont quelque peu assourdissants). La mise en espace réalisée par Paul Pédebibau, qui réalise aussi les recherches documentaires pour les danseurs acteurs, est assez minimaliste puisque ceux qui ne lisent pas réparent le mur tombé, ou plutôt écroulé, en début de soirée. Cela étant dit, on ne peut que regretter que ces réparations se fassent dans le noir avec comme seule lumière, le maigre éclairage des lampes torches que les danseurs acteurs portent en bandeau sur la tête. Si nous apprécions une excellente diction, voire parfaite, de la part de chacun, le texte montant sans effort jusqu’en haut de la salle, nous déplorons qu’une partie des lecteurs – ceux / celles qui étaient en fond de scène – aient systématiquement été « avalés » par le noir qui a investi le vaste plateau du théâtre.
Si l’univers de Maguy Marin peut paraître étrange, il n’en est pas moins explosif. On peut regretter qu’il n’y ait pas plus de danse (un ou deux autres pas de danse auraient été bienvenus entre deux lectures, même si le personnage japonisant qui passe à intervalles réguliers est assez sympathique) dans ce spectacle théâtral quand même très politisé.
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Visuel : © Tim Douet