« L’exploitation à la cool », un témoignage des livreurs à vélo au Off d’Avignon

par Lucine Bastard-Rosset
13.07.2023

Notre société nous pousse à consommer, toujours plus. L’argent se consume et fragmente les individus : d’un côté ceux qui achètent, de l’autre ceux qui sont achetés, enfin volés. Le comédien Cédric Veschambre rend compte des ces injustices en donnant la parole aux livreurs à vélo. L’exploitation à la cool est un discours qui dénonce le capitalisme à découvrir à La Manufacture durant le Festival Off d’Avignon.

La tune attire tout

« J’ai besoin d’argent », tels sont les premiers mots du spectacle et ils en disent long sur ce qui va suivre. « La tune attire tout », elle prend une place primordiale dans notre société, elle devient l’objet de toutes nos pensées, l’unique but commun à l’humanité. Pour vivre, il faut avoir de l’oseille, pour survivre, il faut lutter pour avoir ne serait-ce qu’un peu d’oseille. Jules est un jeune homme qui place son espoir dans la livraison à vélo : « Vive le nouveau monde Uber ! ». Il est persuadé qu’il y trouvera son salut, un moyen de sortir de sa misère et de faire un boulot où l’on choisit ses horaires, où l’on est plutôt bien payé. Le problème, c’est qu’il y a les publicités… et la réalité.

Un seul scène au texte percutant

L’Exploitation à la cool est un seul scène au texte percutant qui met en lumière des individus que nous voyons tous les jours dans nos villes et que nous remercions bien trop peu. Pour nous, ils ne sont qu’un moyen, un outil qu’on utilise sans n’avoir rien à faire : il suffit de cliquer sur un écran et d’attendre. Pourtant, de l’autre côté, la réalité et tout autre car ils sont « du mauvais côté de la frontière numérique ». Les livreurs mènent une course contre-la-montre, ils sont perpétuellement pressés par le temps, sous le joug de la concurrence et des plateformes numériques auxquelles ils ne peuvent même pas s’adresser. Ils vivent dans un monde dématérialisé qui les pousse à aller toujours plus vite. Ils sont classés, éjectés, maltraités, ils sont blessés voire tués.

Cédric Veschambre s’empare du texte de Jules Salé avec ténacité. Il livre une prestation athlétique qui joue sur son physique. Sur scène, il est accompagné d’un vélo qu’il chevauche et escalade : ce camarade sans qui il ne serait rien mais qui le fait tant baver et transpirer. Son souffle court se mêle à ses paroles et lorsqu’il prend le micro, c’est avec beaucoup d’ironie qu’il énumère les lois du marché, cette « sous enchère à qui accepte d’être payé le moins ».

A La Manufacture du 7 au 24 juillet à 14h30. Relâches les 12 et 19 juillet.

Auteur : Jules Salé
Mise en scène : Kheireddine Lardjam
Interprète(s) : Cédric Veschambre
Régie lumière et son : Thibaut Champagne
Création lumière : Manu Cottin
Chorégraphe : Nedjma Benchaib
Création sonore : Marc Nammour
Attachée de prod. : Marion Galon
Chargé de prod. : Sylvain Eloffe

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