Pour clôturer le festival des Francophonies 2023, détour par le CCM Jean Gagnant de Limoges pour voir La Vieille Dame, d’Amira-Géhanne Khalfallah, qui propose une caricature actuelle d’une partie de la population qui résiste toujours et encore aux codes de la bienveillance. Place à l’absurde !
Quand on entre dans la pièce, la salle est encore allumée. C’est normal : nous arrivons au début de la répétition. Mais où est la metteuse en scène ? En retard ? Coincée dans les transports ? Bon, bah on attend et quand elle arrive, on commence ! Et ça commence, papiers à la main, pour raconter l’histoire d’Hélène et de son mari Claude, vieux membre d’un parti politique de droite. Claude est complètement perdu : suite à son AVC, Hélène a oublié la langue française. Elle ne parle plus… sauf en arabe. Pour ce personnage, caricature d’une vieille France à la Christian Clavier dans Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu, c’est inconcevable !
Pour dessiner l’histoire de ce couple, Amira-Géhanne Khalfallah s’est tournée vers les codes du théâtre de l’absurde, du surréalisme et du burlesque. Il en sort un personnage et des situations grotesques qui dépeignent avec humour des réalités critiques. Pourtant, c’est bien sur l’irréel que joue l’auteure. L’irréalité de ces manières de penser. Un décalage évident entre un rapport au monde normal et des représentations sans cesse déséquilibrées. L’absurdité du racisme de Claude est représentée par une destructuration scénique : un joyeux bordel dans lequel rien n’a de sens.
Claude, c’est un personnage de Jacques Tati. Il n’arrive pas à s’assoir sur le rebord d’une table, il ne comprend pas la nouvelle déco de sa femme, il tourne en rond dans la pièce. Si son environnement matériel change, c’est tout son monde qui est désordonné. Mais Claude, c’est aussi un personnage de Ionesco. Les dialogues sont des dialogues de sourds, la sonnerie du téléphone est un air de flûte, il parle dans une tasse au lieu du combiné, il ne comprend rien, il s’énerve, alors il consulte. Il consulte des médecins qui mettent leur masque chirurgical sur la tête. Et puis Claude, c’est aussi un personnage de film burlesque. Il est continuellement porté par une émotion imperturbable : la nervosité. Il tombe, il se cogne, il s’assoit les jambes en l’air. L’inspiration burlesque permet à Amira-Géhanne Khalfallah de le tourner en ridicule.
La narration elle-même n’est pas construite sur un cadre cohérent ayant un début, un milieu, une fin. La situation tourne en rond. Ça tourne en rond, mais le temps passe vite. La pièce est construite sur les décalages et les exagérations comme dans la série Le cœur à ses raisons, et puis c’est la fin de la répétition, alors on y va et à demain pour le spectacle !
Visuel : affiche
Samedi 30 septembre 2023, 10h-18h30
La pièce était jouée dans le cadre de la journée En langueS françaiseS qui visait à promouvoir les diverses francophonies.