Emeric Cheseaux tire sa « Révérence » à la province au Off d’Avignon

par Amélie Blaustein-Niddam
18.07.2025

Dans le très joli jardin de l’ancien Carmel, Emeric Cheseaux, bien formé par l’école de la Manufacture, nous accueille avec un prêche. Oui, un prêche, dans un ancien lieu occupée par des sœurs confinées. Cela ne manque pas d’humour, et pourtant ça ne fait que commencer ! Soyez prêt.e.s à cet apéro géant où toutes les familles, celles de sang et celles de cœur, ont un avis tranché à donner sur la vie de ce garçon.

« Oh merci Jésus de nous donner ta mère pour maman »

Il est derrière un micro, l’air un peu ahuri, en tout cas illuminé. Il y a des cagettes orange et rouge sur la scène. Il salue les retardataires, les présent·e·s, tout le monde. Les bras en accueil et le corps un peu tordu, il sourit, la mâchoire coincée. On est mort·e·s de rire et la pièce a commencé il y a moins de deux minutes. Nous sommes quelque part au fin fond d’un bled. Emeric décide de monter à la capitale pour « faire du théâtre ». Il doit se confronter à tous les stéréotypes possibles sur le métier de comédien, mais aussi à la culpabilité de laisser là ceux qui restent, jusqu’à s’en déconnecter complètement (« tu savais pas ? »).

« Qu’est-ce qu’ils vont penser les gens au village ? »

Dans sa façon de jouer et dans ses mots, il convoque autant Édouard Louis que François Gremaud, qu’il a tous deux croisés à l’école de la Manufacture. Le comédien campe une galerie de personnages immense dans sa diversité. C’est tout le village qui est représenté sur la petite scène du Train Bleu. En un mouvement de doigt, il devient la grand-mère homophobe ; en une courbure de dos, il est la tante sympa ; en un accent grave, il est le beauf de service.

« Si tu veux parler devant les gens, tu n’as qu’à faire curé »

Au-delà de la leçon de théâtre, parfaitement maîtrisée, La Révérence pointe avec finesse les chapes de plomb posées par les familles sur celles et ceux qui diffèrent du reste du clan. Sa collection de personnages dresse un portrait clair et net des constructions sociales très ancrées dans les coins éloignés. Les blagues crasses et les phrases cinglantes fusent à l’occasion de caricatures parfaites. On se marre tout le temps, on rit du pire et du joli avec lui. Génial.

Théâtre du Train Bleu – 19h35- Les jours impairs – Durée 1 heure.
Tiers-Lieu – La Respélid’ / 3 rue de l’Observance.

Visuel : © Gérard Philippe Mabillard