Au NEXT Festival, présenté dans l’immense Condition des soies de Roubaix, le collectif mexicain nous entraîne dans sa quête intérieure pour comprendre à quoi sert le théâtre, dans un voyage en Amérique centrale qui, à trop vouloir être explicite, devient dramatiquement plat et classique.
Nous voici quelque part au bord d’une plage, il y a un garde qui chante, une fille qui se vautre, des bouteilles de soft partout, une piscine, du sable. Tout ça commence pas mal. Puis, très vite, le discours se met en place dans une espèce de caricature de méta-théâtre. En interrogeant pendant toute la durée de la pièce la raison de son existence, le duo nous épuise. Et pourtant, on aurait adoré les suivre dans leurs circonvolutions, on aurait adoré assister à une leçon de théâtre mexicain comme celui d’Anacarsis Ramos ou d’Amanda Piña, dont la construction dissonne avec toutes nos références occidentales. Là, ce n’est pas le cas. Et pourtant, le nœud de cette histoire aurait pu être le prétexte à un grand spectacle. Imaginez. Vous rencontrez une personne qui est réfugiée politique, qui a fui la dictature au Nicaragua, qui vit en cachant son nom et son visage et qui vous demande un service inouï, celui de devenir elle et d’aller enterrer son frère.
Une Antigone au Nicaragua en résumé. Cela aurait pu nous emmener sur des territoires étranges, dans une jungle aussi fournie que celle de Gabriela Carneiro da Cunha vue le même soir. Mais rien ne se passe. Le récit nous est livré face public, bien assis, bien distants dans la salle. Dans une tentative d’assumer la partie documentaire de la pièce, les vidéos de leur road trip sont montrées sur un écran en hauteur à droite de la scène ; là encore, le dispositif est très lisse.
Quant au jeu des comédien·ne·s, il ne parvient jamais à nous toucher, dans ses excès de surinterprétation qui ne collent pas avec l’envie de nous faire entendre et comprendre la réalité du régime totalitaire en place au Nicaragua, dont les exactions et les crimes n’intéressent absolument pas les manifestant·e·s européen·ne·s. Luisa Pardo et Lázaro G. Rodríguez avaient pourtant dans leur main un matériel assez parfait pour nous offrir du pur théâtre documentaire, dans leur esthétique, et dans leur construction, malheureusement, le quatrième mur est ici bien solide.