Le Théâtre 13 accueille jusqu’au 15 mars La Grande Ourse, d’Alice Sarfati.
La Grande Ourse dont il est ici question, c’est la constellation que l’on peut contempler les soirs de pleine lune dans la nuit étoilée. C’est aussi cette nébuleuse de proches, parents et frères et sœurs, qui règnent sur nos vies comme les astres selon les croyances anciennes. C’est, enfin, le caractère volontiers prédateur de ces personnes que nous fréquentons tous les jours.
En fait de constellations, c’est le dispositif de soin des constellations familiales qui a intéressé Alice Sarfati. Des personnes qui ne se connaissent pas se retrouvent pour une thérapie de groupe, où chacun·e est appelé·e à représenter les proches des autres participant·es. Ce qui a frappé la metteuse en scène, quand elle a assisté à l’une de ces constellations, c’est la théâtralité d’un tel phénomène, où chacun·e joue le rôle d’un·e autre.
Cette théâtralité guide en effet la dramaturgie et la mise en scène de La Grande Ourse. Le spectacle commence par les retrouvailles entre deux participant·es de l’une de ces constellations et l’arrivée de deux nouveaux·lles. Le thérapeute, aux faux airs de Knock, estime visiblement que retenir les prénoms de ses patient·es n’est pas de son niveau : iels s’appelleront Pull vert, Fichu ou Débardeur.
L’une des réussites du spectacle repose ainsi sur la création de personnalités fortement dessinées, entre des personnages qui occupent à l’excès l’espace et d’autres qui restent en retrait. Peut-être trop en retrait, à l’instar de Blue-jean/Jeanne, dont la révolte modifiera le cours du spectacle.
Et c’est là que la pièce prend toute son épaisseur. Après le comique de caractère, efficace, mais facile, viennent les tentatives effrénées de Jeanne de comprendre d’où vient son mal-être. Alors les autres, inlassablement, jouent et rejouent ses proches, comme on répète une pièce de théâtre. Toutefois, quelque chose d’autre que les sempiternelles interrogations sur la théâtralité se manifeste ici : ces reconstitutions entrent en résonance avec des schèmes intimes et universels et prennent ainsi le public dans tout son corps. Si l’on déplore une fin – que nous ne révèlerons pas ici – peut-être un peu convenue, La Grande Ourse présente des moments d’une grande force.
Grande Ourse, Alice Sarfati, au Théâtre 13 jusqu’au 14 mars.
Visuel : © Antoine Camard