Deux comédiens très talentueux, un pont établi entre le mythe de Jean-Jacques Goldman et la quête de sens d’un adolescent, une scène qui n’attend qu’à être comblée : Quentin Martin Laprade nous tient une belle promesse dans sa pièce « Puisque tu pars », mise en scène par Joseph Laurent et qui se joue au Théâtre de l’Essaïon.
L’atmosphère dans la salle est à la fois chaleureuse et intimiste, créant une proximité palpable entre les comédiens et le public lors de la représentation. Le décor minimaliste, composé seulement de deux chaises et d’un éclairage subtilement nuancé, permet de se concentrer davantage sur leur performance et nous transporte pleinement dans l’histoire. On remarque également une grande liberté dans leur interprétation : ils investissent pleinement la scène et le plateau avec une aisance captivante.
Gaspard, joué par Gaspard Martin Laprade, se trouve confronté à de nombreuses interrogations sur sa propre identité et sa place dans le monde. Le jeune comédien de 17 ans incarne un lycéen misanthrope désorienté et n’aspirant qu’à une seule chose : assister à un concert de son idole de toujours, Jean-Jacques Goldman. Il partage la scène avec Bruno Bayeux, qui interprète Bruno, un oncle enfantin et touchant mais frustré par une carrière sans succès, qui va l’accompagner dans cette aventure.
Le voyage entrepris pour sauver Gaspard de sa propre détresse offre l’occasion d’engager des débats sur la mort, l’amour, la réussite, les rêves et le rock. À travers ce road trip, une relation spéciale se noue entre lui et Bruno, démontrant ainsi le pouvoir du soutien mutuel pour surmonter les épreuves de la vie.
Gaspard démontre une intelligence remarquable dans de nombreux domaines. Au premier abord, il peut nous sembler froid et éloigné de tout car il possède un mode de pensée et une façon de traiter les informations différentes de la majorité des gens. Puis petit à petit, on se prend d’affection pour lui car on découvre qu’il a une grande sensibilité et qu’il illustre une réalité largement répandue chez les adolescents. À cet âge, ils se questionnent sur leur identité et aspirent à plus d’indépendance, tout en oscillant entre désir d’autonomie et besoin de soutien familial. Dans le cas de Gaspard, ce désir de fuir un environnement qui ne le comprend pas est prédominant, malgré les dangers auxquels il s’expose. La pièce offre ainsi une exploration des émotions complexes traversées par les jeunes, incluant le sentiment d’incompréhension, la solitude et le désir ardent de trouver sa propre raison d’être. Elle met en lumière leur soif d’aventure, leur goût du risque et leur besoin de se sentir vivants. D’ailleurs, on peut penser que son obsession pour Jean-Jacques Goldman symbolise son besoin de se rattacher à quelque chose de plus grand, de trouver un repère dans un monde qui lui semble incompréhensible. Mais elle parle aussi à tous car l’histoire de Gaspard peut résonner avec nos propres défis et triomphes. Il est confronté à des dilemmes et des épreuves avec lesquels beaucoup peuvent se sentir en empathie.
Finalement, comme le souligne Goldman lui-même dans sa chanson Puisque tu pars, “Puisqu’il faut apprendre, À défaut de le comprendre, À rêver nos désirs et vivre des « ainsi soit-il » : il faut apprendre à rêver nos désirs et à vivre pleinement nos choix, même s’ils demeurent parfois mystérieux.
Visuel : ©Théâtres et Producteurs Associés