La saison lituanienne en France bat son plein, et le Théâtre de la Ville poursuit son exploration avec un focus des plus passionnants. Hier, nous avons découvert le travail sportif de Gabrielė Labanauskaitė, Gailė Griciūtė et Viktorija Damerell. Échauffez-vous… chantez.
La première image nous ramène à un autre spectacle. En 2022, dans One Song, Miet Warlop nous avait emmené·es dans une compétition de gym musicale qui était une allégorie du collectif et du don de soi au plateau. Il est vrai que depuis, quand des machines de musculation envahissent un plateau, on pense qu’il sera question de tragédie humaine. Sports Group ne se place pas exactement à cet endroit, même s’il parodie et étrille fort le culte d’un corps parfait, musclé et sain comme l’alpha et l’oméga de l’existence.
Rameur, presse à cuisses, poulie, banc à abdo… Rien ne manque dans cette salle de sport aux couleurs minimalistes. Tout est noir et gris, à l’exception de nos sportifs et sportives qui portent ici une veste rose, là un sweat vert forêt, d’autres encore du vert ou du bleu. Leurs jambes, principalement, sont tatouées, comme marquées par des taches. Ce qui surprend dans cette salle, c’est l’ajout inattendu de tuyaux d’orgue et de soufflets. La performance commence : un·e interprète se déplace et coupe l’arrivée d’air de l’un des tuyaux. La traction des corps sur les machines, combinée aux mouvements des mains sur cet orgue, compose une partition musicale inédite. Le son évoque les écritures de la musique classique contemporaine, faisant penser à Cage, Reich et Glass.
Les textes sont un mélange de citations glanées ici et là ; on reconnaît des cours de yoga sur YouTube et des mantras musclés issus des cours de gym. L’humour affleure face à l’absurdité de la situation. Le chant est-il sportif, ou bien le sport devient-il mélodique ? La musique composée par Gailė Griciūtė est résolument électro-acoustique, mais cela ne l’empêche pas de s’élever, en son cœur, à travers des voix puissantes et des accents presque techno. La caricature de notre monde obsédé par l’apparence physique est finement menée, oscillant entre fascination et ironie.