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27.02.2024 → 27.02.2024

«Il nous est arrivé quelque chose » : Olivier de Sagazan, un gourou qui court

par Mathieu Dochtermann
01.03.2024

Olivier de Sagazan, en électron libre, surprend à chaque spectacle, sondant la zone grise entre théâtre et performance. Avec Il nous est arrivé quelque chose, présenté pour une soirée seulement au Théâtre de Châtillon, il se confronte à des éléments qui nous emmènent à la lisière du mystique : le corps vivant, le langage, le Moi, et la place de tout cela dans le cosmos. Rien que ça !

Ce sont des coups sourds, et une lumière blafarde qui dégouline à peine sur un corps qui s’agite rythmiquement. Ce sont deux mots qu’un technicien lâche et qui crachent dans les haut-parleurs : “Micro plaque !” Ce sont les mêmes coups sourds, ceux de la foulée bien régulière de deux pieds nus, maintenant reprise et amplifiée par ledit micro. Ce sont les quelques données biologiques, électrocardiogramme en tête, qui s’affichent au fond de la scène, tandis que la lumière graduellement augmentée révèle Olivier de Sagazan enfermé dans un cylindre transparent de deux mètres de haut, en plein semi-marathon immobile. On est dans le monde de l’effort, et dans celui de sa mesure, à mi-chemin entre laboratoire de savant fou et Olympiades culturelles. On se dit que Il nous est arrivé quelque chose sera une performance qui ira tester les limites d’un corps – et finalement il ne s’agit pas de cela, ou en tous cas cela ne constitue qu’une étape liminaire vers un tout autre test, celui des limites de notre esprit.

Avec ses électrodes et ses micros, filmé sous tous les angles, ce corps qui court ne prend une place centrale que pour mieux signifier finalement qu’il n’a, en fait, aucune importance. Il n’est observé que pour mieux montrer qu’il est négligeable. De même de la logorrhée verbale qui sort de son appareil phonatoire, en un flot de conscience qui échappe en partie au contrôle de son hôte : Moi n’est pas là, et ce sont les mots, par exemple le mot «là», par exemple le mot « maintenant », ou bien encore des mots qui n’ont jamais existé, qui s’imposent et veulent se faire prononcer. Qu’est-ce que le Moi, s’il n’est ni mon corps, ni cette pensée qui n’est que bruit de mots qui se servent de moi pour s’incarner, semble se demander le performeur ? Et de passer par le détour de la science, de l’astrophysique au cycle de Krebs, et par celui de la philosophie, pour transcender tout cela, et trouver une idée de ce qui nous relie à l’Univers. Et par là rendre sa place à l’humain : ni tout, ni rien, mais partie du tout. En osmose.

Transcendance et basses très fat

On adhérera, ou pas, selon sa sensibilité, au petit shot de philosophie New Age. Mais on peut compter sur Olivier de Sagazan pour convoquer une forme de folie sur scène, une transe dont on ne sait quelle part est jouée et quelle part relève d’un état second. Au passage, il sera mort symboliquement avant d’accoucher de lui-même, symboliquement là aussi, tel un fœtus flottant dans son tube à essai. La proposition fonctionne sur la sidération, devant des images percutées et des lumières stroboscopiques, face à des basses pulsatiles, des flots de mots déréglés et un corps qui s’épuise. Quelques moments d’humour fugitifs permettent un peu de mise à distance, et on peut regretter que cela ne soit pas plus présent.

On imagine que le choc sensoriel est censé nous désarmer suffisamment pour nous laisser disponibles pour une grande révélation. Mais cette dernière ne vient pas vraiment, et ledit choc est somme toute relatif : gros son, effets stroboscopiques, diaporama sous amphétamines d’images quasi subliminales, vrai effort – généreux ! – mais sans mise en danger, on nous a déjà fait le coup, et il faut y mettre un peu du sien pour se laisser aspirer par le cyclone psychédélique. C’est une expérience. On n’en sort pas sans avoir eu le sentiment d’avoir, vraiment, traversé quelque chose (un trip sous LSD ?). Il nous est arrivé quelque chose semble nous suggérer qu’une clé possible est la dissolution de l’égo – mais n’est-ce pas là un message bien paradoxal à faire passer sous la forme d’une performance aussi intensément incarnée par celui qui la porte…?

 

Visuel : DR