À la tête de l’orchestre des Arts Florissants, William Christie fait appel à son étoile lyrique, Sonya Yoncheva, pour célébrer l’une des figures féminines les plus célèbres du Siècle des Lumières.
Depuis la publication de l’ouvrage Marie-Antoinette et la musique (2022), signé par l’historien de la musique Patrick Barbier, la biographie de la reine s’est enrichie d’un pan musical important que l’orchestre des Arts Florissants a souhaité illustrer vendredi dernier.
Le goût de Marie-Antoinette pour la musique et l’opéra exerça une influence certaine sur l’évolution des esthétiques et l’émergence de musiciens et musiciennes talentueux et talentueuses de la fin de l’Ancien Régime. C’est dans cette épopée baroque que nous sommes emmené·e·s par William Christie et Sonya Yoncheva.
La délicate ouverture de la La finta giardiniera de Mozart initie avec légèreté cette soirée « Sonya Yoncheva / Marie-Antoinette ». Le raccord temporel nous est alors donné, direction l’époque de Mozart. Et, même si la rencontre esthétique entre l’un des plus grands compositeurs de l’histoire de la musique européenne et la reine n’aurait probablement jamais eu lieu, le programme nous offre les délicieux extraits d‘Idoménée et de La Clémence de Titus.
Christophe Wilibald Gluck est également mis à l’honneur. Selon certaines sources, le compositeur fut l’un des professeurs de Marie-Antoinette. Si ce fait est parfois contesté, l’admiration de la reine pour Gluck est cependant indéniable. Elle le fit venir à Paris en 1774 et quelques mois plus tard, le musicien lui dédia la partition d’Orphée et Eurydice. De cette œuvre, l’orchestre des Arts Florissants nous joue le merveilleux « ballet des ombres heureuses ». On retient la douceur et la pureté de la flûte allemande de Serge Saitta.
Puis l’une des plus grandes étoiles lyriques actuelles entre sur scène. Vêtue de rouge puis de blanc, Sonya Yoncheva endosse le rôle de la soprano charmeuse. Tout au long de la soirée, elle nous offre sa voix avec une générosité surprenante. Elle transmet avec sensibilité le célèbre Plaisir d’amour de Johann Paul Aegidius Martini et fait preuve d’une belle complicité avec la harpe dans l’interprétation de C’est mon ami de Louis-Claude-Armand Chardin.
La harpe trouve une place de prédilection dans le récital. Il était en effet essentiel de mettre en avant cet instrument que Marie-Antoinette chérissait tant. La volupté et la féérie de l’interprétation de Marie Bournisien s’accordent à la douceur de Sonya Yoncheva.
La soprano se fait également complice du chef d’orchestre, William Christie, à qui elle montre une grande affection. Ensemble, ils se mettent en scène et s’offrent des regards de respect réciproque. Le chef, qui fêtera bientôt son 80e anniversaire, est dans une posture d’écoute très ouverte. Il semble profiter de la voix de Sonya Yoncheva, il la regarde et boit ses paroles. Les gestes calmes de William Christie sont également la démonstration d’une direction d’orchestre sensible et mesurée.
Avec la reprise des deux chants préférés de la reine, l’orchestre des Arts Florissants, William Christie et Sonya Yoncheva concluent cette belle soirée sur un ton bienveillant et des sons entêtants.