La neuvième édition du festival tourangeau Concerts d’Automne a ouvert le vendredi 11 octobre. Le contre-ténor Philippe Jaroussky a triomphé devant les deux mille personnes installées dans le vaste auditorium François 1er du Palais des Congrès de Tours.
Dès les premières éditions de Concerts d’Automne, de grands noms de la musique classique ont fait le déplacement à Tours. Ainsi, le public a déjà eu l’occasion de voir Natalie Dessay et Philippe Jaroussky. Ce dernier est revenu pour ouvrir la neuvième édition d’un festival qui s’est rapidement imposé dans le paysage musical français et international. Pour l’occasion, les responsables de la manifestation se sont installés au palais des congrès ; et ils ont eu raison, car ce sont deux milles personnes qui ont fait le déplacement à l’auditorium François 1er pour écouter le célèbre contre-ténor qui était, en ce vendredi soir, accompagné par l’ensemble Arpeggiata fondé et dirigé par la théorbiste Christina Pluhar.
Pour l’occasion Philippe Jaroussky et Christina Pluhar ont monté un programme original qui fait voyager le public dans une partie de l’Europe des XVIe et XVIIe siècles : France, Espagne, Italie, Angleterre. On ne peut aussi qu’apprécier la présence de compositeurs peu connus comme Gabriel Bataille (1574-1630), Henry de Bailly (1590-1637) ou encore Pierre Guedron (vers 1565-1620) qui côtoient des têtes d’affiche comme Estienne Moulinié (1599-1676), Claudio Monteverdi (1567-1643) et Henry Purcell (1659-1695).
C’est avec une mélodie d’Antoine Boësset (1586-1643), « Nos esprits libres et contents » que Philippe Jaroussky commence son récital. Et on est séduits par la voix de velours du contre-ténor qui interprète cette mélodie charmante avec sensibilité et bon goût. L’accompagnement de l’Arpeggiata est parfait, tant pour les nuances que pour les tempos. Nous avons ensuite droit à un très beau moment avec une improvisation de très belle tenue sur « La dia spagnola » (compositeur anonyme).
« Yo soy la locura. Passacaille (follie) » de Henry de Bailly est l’œuvre qui donne son titre au programme ; elle nous emmène dans l’Espagne de la fin de la période renaissance et du début de la période baroque qui reste étonnamment méconnue. Jaroussky et Pluhar mettent donc cette époque, d’un dynamisme peu commun, à l’honneur avec raison tant elle a produit de belles choses.
Dans le répertoire français, Philippe Jaroussky interprète avec talent trois mélodies d’Estienne Moulinié dont une, composée sur un charmant poème espagnol : « Concert des différents oiseaux, Orilla del claro tajo, Enfin la beauté ».
Si l’on ne peut « écarter » de tout récital de contre-ténor l’air « Oblivon soave » du couronnement de Poppée de Claudio Monterverdi, nous avons aussi le privilège d’écouter une mélodie du même compositeur : « Ohime ch’io cado ». La diversité des compositeurs et des horizons proposés dans ce récital est très appréciable, car, comme on l’a dit, elle permet aussi bien à Philippe Jaroussky et à l’ensemble Arpeggiata de faire un tour d’horizon remarquable de l’activité musicale exceptionnelle de la renaissance et de la première période baroque.
L’accueil enthousiaste du public, qui réserve une ovation debout à Philippe Jaroussky et à l’ensemble Arpeggiata, pousse les deux complices à concéder deux bis. Pour commencer, Jaroussky gratifie le public d’un « Besame mucho » totalement hilarant qu’il interprète en duo avec Lixsiana Fernandez, la violiste de l’ensemble.
Le second bis, annoncé par Philippe Jaroussky comme étant « une rareté retrouvée par hasard dans ses étagères » par Christina Pluhar, est « Déshabillez-moi » que le contre-ténor accompagne d’un début de strip-tease qui laisse son monde légèrement interloqué, mais totalement séduit.
C’est donc un concert triomphal qui a ouvert la neuvième édition de Concert d’Automne. Ce retour de Philippe Jaroussky, accompagné par l’ensemble l’Arpeggiata et Christina Pluhar, à Tours s’est remarquablement passé au vu de l’accueil très enthousiaste qu’il a reçu de la part d’un public venu nombreux.