Pretty Yende a offert un beau récital, ce dimanche soir de Pentecôte, au Théâtre des Champs-Élysées à Paris, avec l’orchestre national d’Ile-de-France. Le public tout acquis au charme de la très charismatique soprano d’origine sud-Africaine, a apprécié ce véritable défilé de tubes lyriques, dans une succession d’airs très variés pour finir par un pot-pourri d’airs de musique de films
Produit par les Grandes Voix, le concert s’est déroulé devant une salle comble et très interactive. Pretty Yende est bien connue à Paris pour avoir déjà interprété de nombreux rôles sur la scène de l’Opéra de Paris depuis quelques années déjà.
Elle a été, très récemment, Semele de Handel dans cette salle de l’avenue Montaigne, et elle reprendra le rôle cet été à Londres. Le public de cette soirée parait plus jeune et partiellement renouvelé pour fêter celle qui a conquis le cœur des parisiens si l’on en juge par la très belle standing ovation qui a accueilli ses performances.
Il faut dire que la jeune soprano ne manque pas d’audace. Délaissant son répertoire traditionnel bel cantiste, elle se hisse vers le haut du panier en commençant par le dernier air de Leonora dans le Trovatore, « Siamguinti….. D´amor sull´ali rosee…. Tu vedrai », cette cavatine à l’écriture vocale complexe où l’interprète doit, durant une ligne musicale continue, donner une suite impressionnante de morceaux virtuoses, non pour la beauté du chant mais pour l’effet dramatique de l’enchainement.
On sent Pretty Yende encore un peu précautionneuse dans ce répertoire un peu lourd pour sa voix, prudente dans la succession d’exercices avec des vocalises et des trilles plus scolaires que naturelles, mais en même temps, la voilà propulsée dans la valse des rôles emblématiques qui font le plaisir et la gloire des bonnes artistes lyriques. Elle abordera d’ailleurs pour la première fois le rôle entier cet été au festival d’Erl, dont Jonas Kaufmann est le célèbre intendant.
Et durant un mémorable (mais parfois un petit peu laborieux) Casta Diva, qu’elle introduit longuement pour présenter l’intégralité de la séquence et qu’elle ne conclut (malgré les applaudissements intempestifs) que sur la dernière note, on voit à quel point elle est désireuse de montrer son appétence pour les plus beaux rôles qui ont fait de Callas cette légende de l’art lyrique. On tremble un peu pour elle tant l’effort est remarquable et notable et tant l’application exemplaire de la soprano montre l’énorme travail effectué par Pretty Yende depuis ses premières apparitions. Et l’on s’en félicite.
Son « Merce dilette amiche », air d’Hélène des Vêpres siciliennes, est beaucoup plus fluide et manifestement davantage dans ses cordes ce qui lui permet de donner une véritable incarnation joyeuse et légère, très convaincante de ce très bel air.
Le « depuis le jour », extrait de Louise de Charpentier, est fort émouvant et sa sensibilité à fleur de peau fait merveille tout comme d’ailleurs dans « l’hymne à la lune », du magnifique Rusalka.
N’oublions pas l’Orchestre National d’Île-de-France (ONDIF) qui offre un écrin flatteur et talentueux à son artiste solo, mais s’illustre également en exécutant quelques ouvertures célèbres fort bien menées sous la baguette énergique de Pablo Mielgo qui se surpasse tout particulièrement dans la fameuse ouverture de la Chauve-souris de Johann Strauss où l’on danserait volontiers la valse sous sa baguette romantique. Sa Vie Parisienne d’Offenbach est également fort endiablée comme il se doit et l’orchestre prend une bonne part du succès du concert.
Le public est ému et conquis, d’autant plus que Pretty Yende montre alors toutes les facettes de son talent en interprétant l’espiègle et touchant « Suis-je gentille… » l’air de Manon de Massenet et l’on rend les armes quand elle esquisse quelques pas de danse fort gracieux sur la scène en chantant « profitons bien de la jeunesse, aimons, rions, chantons sans cesse, nous n’avons encor que vingt ans ! ». Pretty Yende est une très belle interprète, bonne actrice, beau timbre, grâce et authenticité de l’incarnation et sur ces morceaux, elle montre son incontestable talent.
La soirée sera ensuite réservée à des airs qu’elle maitrise parfaitement bien, de « Rosalinde Csárdás », extrait de La Chauve-Souris au « medley » de chants de films américains comme As Time Goes By, Moon River, Edelweiss, The Way We Were, Somewhere Over The Rainbow, autant de tubes qu’elle donne sous une forme « sonorisée » qui convient à ce type d’interprétation « croonée » qui la situent dans l’héritage de Judy Garland.
Et c’est un public en délire – le style lui va très bien – qui lui réclame alors des bis qu’elle donne généreusement et non sans humour et joie de vivre, le « Paris, Paris, Paris » immortalisé par Joséphine Baker et « I feel Pretty » de West side story, clin d’œil à son prénom mais aussi très belle interprétation de la jeune Maria, amoureuse et encore follement heureuse.
Pretty Yende reviendra justement au Théâtre des Champs-Élysées, une première fois à l’occasion du Gala Joséphine Baker le 4 octobre prochain puis pour un récital « Noël en chansons » enfin d’année le 16 décembre.
L’artiste sympathique et généreuse nous a enchantés par sa bonne humeur contagieuse. Merci à elle !
Visuels : © Dario Acosta et photo personnelle.