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Opéra de Francfort : un « Rodelinda » de Händel virtuose, où le drame est vu par les yeux d’un enfant

par Helene Adam
01.02.2025

Après Hercules en ouverture de saison et avant Alcina en fin de saison, l’opéra de Francort nous offrait une reprise de Rodelinda, l’une des œuvres les plus emblématiques de la période anglaise de Händel. Mise en scène brillante, interprétation hors-pair, tous les ingrédients étaient réunis pour une soirée exceptionnelle à la gloire de l’art baroque.

L’un des chefs-d’œuvre de l’Opera séria

Rodelinda est créé à Londres en février 1725 au King’s Theatre, quelques mois après le précédent opera seria de Händel, Tamerlano et avec les mêmes chanteurs, les plus en vus de l’époque, notamment le célébrissime castrat Francesco Bernardi, dit Senesino ou Il Senesino, créateur auparavant du rôle-titre de Giulio Cesare in Egitto.

Les trois ouvrages de celui qui est alors le directeur musical de la Royal Academy of Music de Londres, sont parmi les plus emblématiques de cet art de l’opéra italien que Händel illustre magnifiquement.

La facture baroque classique est à son apogée avec ses importants récitatifs et continuo, suivi des arias avec ornementations, ses da capo en variations improvisées accompagnées par un orchestre déjà conséquent, mais aussi des duos, trios, ensembles, sinfonias (parties purement instrumentales).

Mais Händel ne produit pas que du « beau chant » : l’opera seria raconte une histoire avec une trame dramatique précise et cohérente, qui annonce clairement les révolutions du dix-neuvième siècle en la matière. Et les retrouvailles de ce genre sur instruments d’époque sont un véritable bonheur dont certaines formations ou maisons d’opéra se sont fait une spécialité.

 

Parmi ces œuvres, Rodelinda n’est pas la plus souvent « donnée », mais Francfort, dont la qualité en musique baroque se confirme chaque saison, en a confié la mise en scène à Claus Guth en 2019 et reprend depuis, régulièrement, cette très belle production qui valorise en la modernisant l’histoire quelque peu rocambolesque de trônes usurpés et de jalousies diverses dans la Lombardie du septième siècle de notre ère.

Corneille en avait déjà tiré une pièce, Pertharite (1651), qui connut un échec retentissant, mais fut ensuite réécrite en poème par Antonio Salvi en 1710, et adaptée en livret par Nicola Haym pour l’opéra de Händel, qui fit, lui, un véritable triomphe à sa création.

Ajoutons également que le choix des tessitures dans le style baroque est particulièrement harmonieux puisque le roi déchu Bertarido et son ami Unolfo sont des rôles écrits pour des castrats et tenus aujourd’hui par des contre-ténors, le meilleur choix pour respecter celui de Händel à notre sens, tandis que l’usurpateur Grimoaldo (mais qui finira bien) est un ténor, les deux femmes sont sopranos et alto, contraste classique des voix féminines et enfin, bien sûr, le « méchant » Garibaldo est une basse.

L’intelligente mise en scène de Claus Guth

Les metteurs en scène d’opéra dits de « regietheater » (ce qui signifie « directeur de théâtre » en allemand), sont en fait très divers dans la qualité de leurs réalisations, mais ont, en commun, la volonté de donner son sens théâtral à l’opéra. De ce point de vue, Claus Guth se range parmi ceux, à notre goût, qui ont donné des lectures renouvelées et réellement rajeunies des œuvres de l’ère baroque en valorisant au travers d’une scénographie soignée, autant les tensions dramatiques entre les personnages que la profondeur de leurs sentiments.

Et Händel se prête magnifiquement à cet exercice où l’on prend conscience du sens de ce chacun dit même s’il ou elle le chante avec force de reprises ornementées brillantes.

 

Pour ce Rodelinda, dont la production a été  révisée par Axel Weidauer pour ces reprises, Claus Guth transpose la scène dans un élégant pavillon de style Mansard, fort élégant, dont on verra successivement, dans le décor unique de Christian Schmidt, la façade, puis deux autres côtés, l’un montrant les pièces du bas et celles du haut en coupe, l’autre un profil de l’intérieur de la maison avec un escalier et deux paliers qui se font face.

Outre le fait que l’on ne perd pas de temps à changer les décors puisque les « vues » de la maison sont actionnées par une tournette discrète et silencieuse, Claus Guth ajoute toute une série d’images projetées en vidéo sur le rideau de scène fermé ou directement sur la façade de la maison, qui représentent le paysage (forêt, lauriers, cyprès, cités dans les arias) et surtout les dessins de l’enfant, Flavio fils de Rodelinda, personnage muet, mais omniprésent, du point de vue duquel l’histoire se passe.

À ces multiples croquis souvent touchants, on comprend quelle lecture il a de la tragédie des « grands » qui se déroule devant ses yeux et dont il est l’un des enjeux puisque héritier naturel de son père en principe mort, d’un trône qui lui est disputé par un rival.

Il imagine aussi des « monstres » représentés par des figurants déguisés qui seront de plus en plus nombreux au fur et à mesure que l’histoire se tend, et ne disparaitront pas de l’imaginaire de l’enfant traumatisé même lors du final pourtant joyeux puisque Rodelinda connait une « happy end ».

De nombreuses autres trouvailles scéniques illustrent chacun des tableaux et sans les citer toutes, nous retiendrons la rencontre entre Rodelinda et Eduige au début de l’acte 2, robe blanche et gants noirs pour l’une, robe noire et gants rouges pour l’autre, se croisant, se frôlant, s’affrontant tout en chantant, ou l’émouvant dialogue entre Rodelinda et son mari Bertarido, condamné à mort, chacun situé sur l’un des paliers de la maison avec la cage d’escalier les séparant malgré leur douloureuse tentative de se rejoindre. Scènes de colère, de duels, de combats, de meurtres, mais aussi scène de déploration, l’ensemble des « états » donne lieu à des illustrations qui font sens et font renforcer les fortes émotions que la musique génère en permanence.

Soulignons enfin, car une fois n’est pas coutume ces derniers temps sur nos scènes, l’élégance des costumes de Christian Schmidt, chacun des protagonistes étant vêtu dans le style chic et riche du début du siècle, seul le roi déchu et officiellement mort, Bertarido, apparaissant en costume beige défraichi, sac sur l’épaule, en roi vagabond qui doit se cacher de ses ennemis comme de sa femme, de son fils et de sa sœur.

C’est exactement ce que l’on demande à une bonne mise en scène.

Un plateau vocal époustouflant

Et quand l’on a la chance d’avoir des solistes très brillants, appartenant généralement à « l’ensemble » de la maison (leur troupe), la performance est particulièrement réussie.

Le rôle très important du petit garçon effrayé dans ce monde d’adultes menaçants, est tenu par la danseuse Irène Madrid que l’on voit sans cesse en action, soit derrière une fenêtre de la façade, soit en haut de l’escalier, tapi sous la table, dans un recoin, dessinant frénétiquement sur sa tablette ou tentant de rentrer en contact avec ceux qui semblent l’ignorer, ses fantômes fantasmagoriques, dont les rôles sont également assurés par des danseurs qui suivent la chorégraphie, elle aussi très élégante, de Ramses Sigl et Patricia Roldán.

Les solistes ne sont pas les mêmes que lors de la première série de représentations en 2019, sauf l’impressionnant Garibaldo de Božidar Smiljanić, un baryton basse à la voix forte et fort bien construite, qui donne à son rôle toute la perfidie et la duplicité recherchée et impressionne par sa présence scénique.

L’un des atouts maîtres est l’arrivée dans la distribution du contre-ténor Lawrence Zazzo, au timbre large et généreux, capable de mille nuances dans un chant toujours très habité et très émouvant et qui crée véritablement le personnage de ce « roi errant » sur scène. Ses deux arias désespérées, «  Con rauco mormorio » à l’acte 2 et « Chi di voi fu piu infedele » à l’acte 3, arrachent des soupirs à la salle en plus d’une belle ovation. Et l’on se félicite de l’arrivée à Francfort du contre-ténor Rafał Tomkiewicz qui campe un Unolfo fidèle et intrépide, l’ami de toujours qui risque tout pour son roi, d’une voix très claire et très belle au timbre rond, très différent de celui de Zazzo et offrant un saisissant et agréable contraste. Il va de soi que l’aisance dans les trilles, ornementations, vocalises, et autres variations dans les reprises, sont les atouts maitres des deux artistes particulièrement brillants hier soir.

 

Mais les deux femmes -dont le rôle-titre- ne sont pas en reste. Nous avions déjà entendu sur cette scène en Pamina, la jeune soprano Elena Villalon. Le rôle de Rodelinda est beaucoup plus exposé en exigences belcantistes, et l’on sent l’artiste prudente, bien qu’irréprochable sur le plan du style vocal, lors de son premier air « L’empio rigor del fato ». Mais elle prend rapidement de l’assurance, donnant de l’épaisseur à son personnage et interprétant avec de plus en plus de conviction et de fougue, sa partition, notamment les superbes « Morrai si, l’empia tua testa » à la fin de l’acte 1, ou « Ritorna oh caro e dolce moi tesoro » à l’acte 2, et le magistral «  Se’l mio duol non è si forte » à l’acte 3 sans oublier le magnifique et déchirant duo avec Zazzo « Io t’abbraccio », un sommet de poésie et d’émotions.

Là aussi, en contraste parfait, la voix de la mezzo-soprano Zanda Švēde qui interprète Eduige possède un timbre de bronze, une coloration riche et profonde qui contraste avec le côté plus cristallin de Rodelinda, l’une et l’autre parfaitement en phase dans leurs duos et dont les silhouettes se ressemblent dans l’élégance, s’opposant dans les nuances vocales à merveille.

Enfin le ténor Josh Lovell, peut-être un tout petit peu moins à l’aise dans un rôle qui ne fait pas appel aux aigus, mais reste dans une tessiture moyenne, campe cependant un Grimoaldo très convainquant, qui passe du méchant au gentil en quelque sorte, et ne doit donc jamais apparaitre comme trop cruel ou machiavélique pour préserver le « twist » du final. Et nous avons beaucoup apprécié son intelligente performance.

 

Francfort possède son propre orchestre baroque dont nous avons déjà eu l’occasion de vanter le très beau son. Sous la direction de Simone Di Felice, coach des solistes de la maison et nommé Kappelmeister depuis 2017, ce Rodelinda est mené de main de maître et la richesse des parties instrumentales comme de l’accompagnement des arias, est confondante de précision et de beauté.

Nous le retrouverons d’ailleurs, la soirée suivante, dans la direction de Macbeth de Verdi.

Comme pour le Hercules vu en novembre dernier, ce Rodelinda a provoqué la très méritée standing ovation d’une salle comble et captivée durant trois heures de musique.

Opéra de Francfort

 

Visuels : © Barbara Aumüller