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Opéra de Francfort : « Macbeth » de Verdi, ou la démesure d’un couple meurtrier, avec Nicholas Brownlee et Tamara Wilson

par Helene Adam
02.02.2025

L’opéra de Francfort réussit une très belle soirée Verdi avec ce Macbeth servi par des chanteurs, particulièrement performants sur le plan théâtral, dans une mise en scène qui privilégie l’analyse de la psyché des personnages nous plongeant dans une atmosphère terrifiante, en apparence banale. Une très belle interprétation musicale confirme la qualité des artistes et du chef d’orchestre, toujours assurée dans tous les répertoires.

Le couple maudit

L’opéra de Verdi, on le sait, s’inspire de la pièce éponyme de Shakespeare, mais donne à Lady Macbeth, un rôle beaucoup plus important l’élevant au rang de personnage principal aux côtés de son mari, qui, sous son emprise, commet les meurtres nécessaires à son accession à la royauté tant convoitée.

La mise en scène de R.B. Schlather prend résolument le parti de creuser cette relation toxique où chacun nourrit l’autre de son ambition sans limites, sans chercher à donner d’autres éléments de contexte étrangers à l’histoire racontée.

Ce qui fait que la transposition des scènes dans le très beau décor d’Étienne Pluss – la pièce de réception d’une grande villa cossue – souligne intelligemment le contraste entre ce couple qui avait tout pour être heureux et notamment richesse et opulence, et la noirceur de leurs desseins animée par la folie du pouvoir.

Le metteur en scène imagine d’ailleurs que c’est en entendant les chants d’un groupe d’enfants déguisés fort élégamment pour Halloween, que Macbeth, alors de retour d’une partie de tennis avec Banquo, prend leurs paroles pour la prophétie qui déclenchera les suites tragiques accomplies par un esprit dérangé.

L’ambiance est celle d’une fête, mais le jeu subtil des lumières (que l’on doit à Olaf Winter) suggère en permanence le maléfice à l’œuvre. Les écrans allumés de trois téléviseurs passent d’ailleurs des extraits du Fantasia de Walt Disney soulignant l’ambiguïté des jeux macabres auxquels vont se livrer Macbeth et sa femme.

 

À l’acte 2, le contraste est encore plus violent, puisque dans la belle pièce dont les fenêtres s’ouvrent sur le parc, on fête Noël avec un superbe arbre fort bien décoré, des invités habillés de vêtements de cérémonie très chic, rouge, vert, lamé argent, lamé or. Il neige derrière les carreaux tandis qu’un faux feu de cheminée s’allume sur tous les écrans.

Lady Macbeth apparait en robe rouge bordée de fourrure façon mère Noël tandis que Macbeth est en frac. L’un et l’autre apparaissent de plus en plus « dérangés » par leurs visions et leur obsession commune tandis que la fête semble se dérouler normalement. Le « spectre » que Macbeth croit voir n’est qu’un enfant (vêtu d’un fort beau pull de Noël).

Peu à peu la belle pièce se vide de ses invités pour ne laisser que le couple en tenue de nuit, errant entre la salle et la terrasse, fenêtres ouvertes. Les écrans, eux, diffusent des images d’actualités de la guerre. Et c’est par ces grandes baies vitrées que se massent les proscrits écossais qui sont en fait la vaste domesticité de la maison, et deviendront avec le secours des Anglais, le peuple conduit par Macduff et Malcolm. La scène de somnambulisme et la mort de Lady, comme la folie finale de Macbeth, demandent alors des talents particulièrement importants aux interprètes, mais ce choix intimiste convient très bien à l’œuvre de Verdi et concentre l’attention du spectateur sur le va-et-vient permanent entre le couple et le chœur, l’une des grandes réussites musicales du compositeur, avec ces thèmes obsédants qui reviennent sans cesse.

Nicholas Brownlee de Wotan à Macbeth

Quand il prononce les paroles fatales et finales « La vita… che importa?…/È il racconto d’un povero idiota/Vento e suono che nulla dinota! », Nicholas Brownlee donne une dernière fois toute la puissance de sa voix, et exprime avec une conviction sidérante, cette folie qui s’est emparée de son personnage.

Ce baryton, soliste de l’ensemble de l’opéra de Francfort est assurément un phénomène et on peut sans risque de se tromper lui prédire une belle carrière ! Nous l’avions découvert en Sachs en 2022, revu en Jochanaan dans Salomé début 2024, puis en Wotan dans l’Or du Rhin à l’Opéra de Munich, prologue du « nouveau » Ring mis en scène par Tobias Kratzer avant de l’entendre dans ce Macbeth qu’il domine de la tête et des épaules comme si aucun rôle réputé difficile ne lui faisait peur.

Systématiquement remarqué et désormais très recherché, il est l’un de ces chanteurs qui habitent la scène de leur présence charismatique. Le timbre est beau et la projection insolente, les nuances n’ont pas de secret pour lui bien au contraire, et il sait faire évoluer sa voix selon qu’il chante Wagner ou Verdi.

Il fera ses débuts au Festival de Bayreuth cet été en chantant Donner dans l’Or du Rhin, mais sera auparavant, Amfortas dans la nouvelle production de Parsifal à Francfort.

Quel programme ! est-on tenté de dire… Mais pour le moment, tout en restant souvent (et sagement) à son port d’attache de Francfort, Nicholas Brownlee vole de succès en succès à travers le monde et c’est incontestablement l’un des barytons de caractère comme nous les aimons. Son « Di voi chi ciò fece ? » littéralement habité et chanté avec une expressivité impressionnante, restera dans les mémoires.

Tamara Wilson de Brünnhilde à la Lady !

La soprano américaine faisait ses débuts à Francfort dans cette nouvelle production de Macbeth et a malheureusement raté la Première du 2 décembre, aphone et contrainte d’être doublée par une autre artiste pour le chant. Mais, depuis lors, elle a assuré toutes les représentations et son interprétation est de celles qui marquent les esprits.

Elle a, elle aussi, chanté Wagner, mais également Béatrice di Tenda ou Adriana Lecouvreur, récemment à Paris. Autant dire que l’éclectisme ne lui fait pas peur et qu’elle sait adapter ses moyens techniques aux rôles auxquels elle se confronte avec beaucoup de personnalité.

 

Si le premier air de Lady – « Vieni t’affreta »- la trouve légèrement en difficulté du fait d’aigus qu’elle ouvre trop en enflant démesurément le volume de sa voix de manière un peu caricaturale (mais que l’exercice est difficile !), la suite est impressionnante et très convaincante. Elle nous offre notamment un admirable « La luce langue » et un bouleversant « Una macchia è qui tuttora » où elle se déchaine littéralement tout en maitrisant parfaitement vocalises et aigus filés. Bonne actrice dans cette mise en scène, elle fait la paire avec Nicholas Brownlee dans la description du couple, tant musicalement que scéniquement.

Verdi a écrit pour des interprètes de la démesure et nos artistes se plient avec talent à cette difficile partition.

Belle distribution générale

Les autres rôles sont beaucoup plus valorisants pour les interprètes du « beau chant ». Ainsi Banquo dispose-t-il comme Macduff d’une de ces arias divines et célèbres composées par Verdi, « Studio il passo » pour l’un, « La paterna mano » pour l’autre. Andreas Bauer Kanabas campe un Banco à la très belle voix, chaude et grave tandis que Mattéo Lippi qui fait ses débuts à Francfort, livre une incarnation sombre et puissante de Macduff, incarnant à merveille l’indignation et la colère du personnage qui tuera Macbeth.

À leurs côtés, on saluera également les courtes et belles apparitions de Kudaibergen Abildin en Malcolm chevelu et un rien vagabond, mais qui deviendra roi et forme avec Mattéo Lippi un très beau duo final et Karolina Bengtsson en suivante de Lady, jolie voix, élégance scénique et présence chaleureuse.

Chœurs et orchestre au top

La qualité Francfort c’est évidemment cet ensemble de solistes de qualité internationale, mais c’est aussi un chœur exceptionnel de justesse et de musicalité sous la direction de Manuel Pujol qui brille tout particulièrement dans ce répertoire verdien où il est très sollicité du début à la fin pour incarner l’ensemble des sorcières, puis des invités, puis la foule des Écossais et l’armée anglaise, bref tout un programme d’airs célèbres eux aussi, qui sont interprétés avec subtilité.

L’orchestre quant à lui, était dirigé par Simone Di Felice qui avait déjà assuré la direction de la formation baroque la veille pour Rodelinda.

Les premières représentations étaient placées sous la direction de Thomas Guggeis, dont la réputation internationale est désormais acquise et qui préside aux destinées artistiques de la maison avec le talent qu’on lui connait.

Simone Di Felice se place dans ses traces à la tête de l’Orchestre de l’Opéra et du Musée de Francfort, évitant le clinquant et préférant faire ressortir la subtilité des contrastes et des couleurs voulues par Verdi dans une interprétation globale très respectueuse des chanteurs.

Et comme la veille, la salle comble a réservé une standing ovation à cette dernière représentation de la saison.

Opéra de Francfort –  Macbeth – Séance du 1er Février 2025

 

Visuel : © Monika Rittershaus