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10.06.2025 → 14.06.2025

L’opéra de Rouen réalise un retour convaincant de la « Semiramide » de Rossini

par Paul Fourier
12.06.2025

Donner le dernier opéra « italien » du compositeur n’est pas une mince affaire. Cela n’empêche pas la production d’être une réussite, à peine ternie par la participation presque incongrue du contre-ténor Franco Fagioli.

Dans la carrière de Rossini, Semiramide est un opéra singulier : apothéose de sa maestria d’écriture dans le domaine seria, il est surtout son dernier opéra composé pour l’Italie, avant l’exil parisien. Symboliquement, il semble refermer une boucle ouverte dix années auparavant, par le triomphe de Tancredi dans le même théâtre, celui de la Fenice de Venise, avec le même librettiste (Gaetano Rossi) et la même inspiration voltairienne.

Semiramide s’affirme, de fait, comme la consécration temporaire d’un parcours qui va ensuite connaître une période parisienne, bien différente par ses contraintes comme par l’évolution de l’écriture du maître.

Lors de la création le 3 février 1823, le rôle difficile de la Princesse babylonienne est incarné par Isabella Colbran, l’épouse et l’interprète de tant des grands rôles seria rossinien. Après elle, s’y illustreront entre autres Adelina Patti, la Pasta puis, Sutherland et Caballé lors de la Rossini Renaissance (dont les mythiques représentations aixoises avec Marylin Horne), et plus récemment, Jessica Pratt et Angela Meade.

Musicalement, outre la magnifique ouverture, les remarquables airs introductifs de Semiramide et d’Arsace et de deux airs virtuoses pour ténor, l’œuvre est riche de superbes duos – dont le plus dramatiquement spectaculaire est celui qui confronte Semiramide et Assur au début de l’acte II – et des saisissantes fins d’acte dans le plus pur style rossinien.

C’est donc, incontestablement, un chef-d’œuvre, mais la combinaison des exigences (notamment les difficultés pour les solistes) place – comme souvent pour les Rossini seria – la barre particulièrement haute et impose à toute nouvelle production, d’assumer une part de défi dont on peut créditer, cette fois, l’Opéra de Rouen.

La Reine Karine en prédatrice de choc

Ce défi est, par ailleurs, complexifié par un livret, reflet d’une époque révolue, aux ressorts dramatiques contestables, et difficilement exploitable en l’état, en 2025.

Deux choix se présentent donc au metteur en scène : soit une illustration picturale axée sur les richesses de la cour de Babylone, (c’était globalement l’option choisie pour la production vénitienne de Cecilia Ligorio en 2018), soit tenter par un effort louable d’inventivité de transposer l’action pour la faire résonner dans l’imagination du public.

C’est le choix fait par Pierre-Emmanuel Rousseau qui, pour l’esthétique, l’ambiance générale et les relations entre les protagonistes s’est inspiré des Prédateurs le film (1983) de Tony Scott avec Catherine Deneuve, et de Eyes Wide Shut (1999) de Stanley Kubrick. Dès l’ouverture, la mort, omniprésente dans l’œuvre, est ici mise en évidence par des tombeaux qui accueillent les morts (dont Nino, le mari, exécuté de la main même de Semiramide), mais que l’on présume aussi pouvoir loger des vampires dont l’héroïne elle-même, qui affirme son goût du sang et des sacrifices humains.

 

Le sacrifice est d’ailleurs porté par une danseuse (l’excellente Éléonore Guipouy), membre de l’entourage de la Princesse, qui échappe une fois (mais pas deux) au châtiment.

La mort se réinvitera ensuite par le truchement du cadavre saisissant (et visuellement très réussi, interprété par Victor Bouaziz-Viallet), puis avec Azema (Natalie Pérez dans un rôle auquel Rossini n’a, malheureusement, pas donné une grande consistance vocale) en ange exterminateur.

 

Dans son entreprise, Rousseau bénéficie d’une interprète qui peut sans problème être le pivot de la production, car, au milieu d’une intrigue compliquée, émerge le personnage de Semiramide, rôle complexe et intéressant par son évolution psychologique, meurtrière de son époux et amoureuse d’un homme dont il lui sera révélé qu’il est son fils.

De fait, l’esthétique sombre (comme souvent chez Rousseau) rehaussée par l’or de la royauté, s’accorde bien avec les ambivalences d’une héroïne que Karine Deshayes porte avec flamboyance, revêtue d’un tailleur cintré, et coiffée d’une perruque blonde.

Quoi que pas franchement soprano (ce qui se ressent principalement pour les aigus, remarquables il est vrai, mais qu’elle est amenée parfois à projeter plus que de mesure), Dehayes s’avère en mesure de porter cet archétype de « rôle Colbran », tant par l’incarnation dans l’univers d’un compositeur qu’elle pratique depuis longtemps, que par le style, la souplesse de la voix, et l’endurance nécessaire d’un rôle qui en exige beaucoup. Son grand air (« Bel raggio lusinghier ») est une démonstration éclatante de cette adéquation naturelle et Deshayes, ensuite, va s’affirmer comme une interprète idéale, dès qu’elle est en présence d’Arsace ou d’Assur.

 

On aurait aimé être aussi transportés par le Arsace de Franco Fagioli, dont on imagine qu’après l’avoir déjà incarné à Nancy, il souhaitait revenir au rôle.

Le chanteur ne manque ni d’un ambitus impressionnant lui permettant de donner toutes les notes de la partition, ni d’une souplesse de voix absolument remarquable. Mais le résultat ne convainc pas, car il s’avère que le choix de confier le rôle à un contre-ténor (cela sans aucune justification historique) déséquilibre le plateau vocal. Ce choix, par moments, s’avère même pénible, notamment dans les duos, tant la rondeur d’une voix féminine fait là défaut et que, surtout, les passages de registre se révèlent rudes, mettant fréquemment en péril la justesse. En fin d’opéra, on aura tout de même été brièvement réconcilié avec Fagioli par la qualité du dernier duo entre la Reine et Arsace, qui évoluant dans les aigus, sans trop de sauts de registre, a été de belle tenue.

La révélation Manoshvili

Si l’en est un, en revanche, qui nous a éblouis, c’est le Assur de Giorgi Manoshvili que l’on avait quitté la veille, dans un récital Rossini, sur la scène du Felsenreitschule de Salzbourg !

Le jeune chanteur captive par la puissance de la voix, la richesse du timbre, la souplesse belcantiste, l’aisance des vocalises et la facilité déconcertante avec laquelle il assume avec naturel, voire avec une certaine jouissance, son jeu d’acteur souvent outré (et malgré, disons-le, une propension de Rousseau à charger la barque sur son côté cocaïnomane).

C’est donc aussi grâce à lui que le duo Semiramide-Assur va s’avérer être le sommet de la soirée, car, à ce moment, sa voix s’accorde idéalement avec celle d’une Karine Deshayes, décidément dans une forme éblouissante. Plus tard, son « Deh ! Ti ferma! » appuyé sur un legato de rêve, aura fini de nous convaincre de l’avenir assuré de cet artiste d’exception (déjà programmée dans les grandes maisons la saison prochaine).

Par ailleurs, il était plaisant d’entendre un Oroe de la même trempe et d’une belle autorité en la personne de Grigory Shkarupa.

 

Alasdair Kent possède une voix typique de ténor léger rossinien et les qualités requises tels qu’une vocalisation aisée, des suraigus lancés sans problème, et également un médium consistant. Par conséquent, l’on regrette que ce dernier ait été sacrifié par la production, puisque l’un de ses deux airs est passé à l’as, ce qui n’a pas empêché le second (« La speranza più soave ») d’être parfaitement exécuté malgré ses difficultés pyrotechniques (avec montée au contre-mi).

Enfin, même si l’orchestre dirigé par Valentina Peleggi n’a pas toujours fait preuve de finesse (ni de justesse et d’une extrême coordination au début), il s’est avéré aussi efficace que ce que l’on peut attendre pour une œuvre qui exige de mettre en évidence le flot sonore rossinien et ses contrastes. Quant au chœur Accentus /Opéra de Normandie Rouen, outre qu’il a bénéficié de superbes costumes, il s’est montré très clair, mais l’on a aussi parfois pu s’interroger sur son homogénéité.

Réécouter Semiramide est toujours un plaisir rare, et l’occasion de rappeler le génie – encore trop souvent ignoré – de Rossini. Le quasi sans-faute de la distribution et les performances remarquables de Dehayes et Manoshvili auront permis, lors de très beaux moments, d’atteindre les sommets attendus pour cet incontestable chef-d’œuvre.

Semiramide de Rossini à l’Opéra Orchestre Normandie Rouen. Réservations.

 

Visuels : © Caroline Doutre