« Je suis passé maître dans l’art de la bêtise ». À la Maison de la Radio et de la Musique, la nouvelle adaptation de l’opéra de Maurice Ravel conquit les rires. En cinquante minutes à peine, le spectacle de Rodolphe Théry capte une salle pleine d’enfants et entraîne tout autant les grands dans une traversée musicale aussi vive que sensible.
Dès les premières minutes, l’énergie est là. Et c’est peu dire tant il en faut pour conquérir l’attention d’une salle qui tenait plus d’une cour de récré avant l’entrée vigoureuse de Geert van Herwijnen. Puis le comédien entre en scène. Exercice acrobatique que de jouer un enfant sans tomber dans la caricature, mais ici, le défi est relevé. En effet le contact est immédiat, il ne cherche pas à faire taire, il attire, et ça fonctionne par l’intérêt du jeu et par un rythme entrainant parfaitement maîtrisé. Alors la jeune assemblée se laisse happer, et se met au diapason, le spectacle est lancé.
L’œuvre met en scène le monde de l’enfance à travers le conflit d’un enfant et sa mère. Dans cette chambre devenue terrain de jeu et de révolte, le garçon laisse éclater ses caprices, et, peu à peu, les objets de sa vie quotidienne s’animent pour se venger des tourments qu’il leur a fait subir. Un renversement poétique, presque cruel.
La mise en scène, simple et légèrement étriquée, se pare de toutes les couleurs, tout comme le costume. On plonge alors dans une chambre d’enfant, avec suffisamment de fantaisie pour stimuler l’imaginaire, mais laissant la place à l’essentiel : la narration, et, bien sûr, la musique. Omniprésente, prenante, parfois même surprenante, elle accompagne chaque mouvement du récit, épouse ses changements d’humeur, souligne les revirements, et nous porte sans effort, comme dans un conte qui sait exactement où il va.
Quant aux voix des interprètes Marion Tassou et Romain Dayez, elles structurent l’espace sonore. Leur justesse et leur expressivité apportent une profondeur inattendue, donnant au concert une véritable dimension théâtrale, alors que le garçon, quand il prend la parole, déclenche un tourbillon musical, parfois tonitruant, qui accentue son tempérament et ses débordements.
Ce qui frappe surtout dans cette représentation, c’est l’équilibre. Le spectacle est clairement pensé pour les enfants, qui y trouvent divertissement, mais la musique, elle, embarque aussi les adultes, qui s’y laissent volontiers prendre. Au final, L’Enfant et les sortilèges réussit là où beaucoup échouent : parler aux enfants sans les prendre de haut, et aux parents, sans les oublier. Une magie maîtrisée, pour célébrer le 100ème anniversaire de l’oeuvre originale, à retrouver ce samedi 13 décembre 2025 à la Maison de la Radio et de la Musique, à 17h.
Visuel : illustration de Cécile Pruvot
Billetterie à retrouver ici.